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Danses, Opéras et Récitals

Paris et Province

Concert de l'Académie Jaroussky

Une clôture spectaculaire – L’active saison musicale parisienne connaît chaque année une heureuse conclusion : l’illustre concert de fin d’année de la dynamique Académie Jaroussky. Cette gentille ruche active à donner l’accès réel à tous, aux plus jeunes en particulier à la musique et à une formation musicale émérite.

C’est en effet auprès de quatre grands artistes internationaux que sont formés ces jeunes talents de demain, ils sont dans des mains expertes. La culture pour tous, l’excellence pour chacun est le mot d’ordre de cette jeune institution qui fête cette année ses 7 ans. Le programme Jeunes Apprentis accompagne les 7 à 12 ans, sur 3 ans, il forme 75 élèves gratuitement, avec le prêt d’un instrument à la clef.

Ils sont parrainés par les Jeunes Talents de l’Académie, 20 artistes de 18 à 30 ans, dont la promotion Brahms nous donne ce 14 juin la distinction de ses talents. Ils sont coachés avec passion et affection par le contre-ténor Philippe Jaroussky, le violoniste NemanjaRadulovic, la violoncelliste Anne Gastinel, le pianiste Cédric Tiberghien. Une école multiforme qui entreprend des cours privés et publics à la Seine Musicale, ainsi qu’un actif programme Hors les Murs.

Nous avons hâte de retrouver l’architecture magnifique de Shigeru Ban, où 115 concerts et cours ont été donnés à ce jour, rassemblant 19 400 spectateurs venus voir les exploits vocaux et musicaux de cette joyeuse académie qui fait aimer la musique. Ils sont accompagnés ce soir par l’Orchestre de la Garde Républicaine, dirigé par le colonel François Boulanger.Au programme de ces réjouissances de 3h avec entracte : Mozart, Bach, Sibelius, Schubert, Lalo, Saint-Saens, Vivaldi, Tchaikovsky, Massenet, le fin du fin des arts classiques.

La belle et ronde salle Devedjan est certainement l’une des plus belles et plus sonores salles de musique classique de Paris. Toute de bois vêtue, elle délivre un son sans égal, permettant d’apprécier toutes les nuances et finesses des instruments et voix se produisant en ces lieux, telle une cathédrale du son. A d’autres égards, son revètement en céramique coupe les portables intempestifs. C’est dans cette jolie bulle que nous allons vivre un concert exceptionnel. Bien placés en 1er balcon sur la gauche, nous voyons les mains des artistes, les sièges sont d’un confort remarquable, ajoutant au plaisir d’écoute.

Une première est de voir la promotion Brahms, ultra-talentueuse, être accompagnée par l’orchestre de la Garde Républicaine, placé sous la direction du colonel François Boulanger. Uniformes bleu, blanc, rouge de rigueur, ils font preuve de justesse, discipline et d’une exécution parfaite. On ne se lasse pas d’admirer leurs beaux instruments, notamment ces trois grandes caisses en fond d’orchestre ou de voir son périmètre évoluer au fil des morceaux, tel l’ajout d’une harpe ou d’un clavecin.

21 titres choisis vont se succèder avec grâce, il serait difficile de citer à tous ses élèves, d’autant que tous révèlent de prodigieux dons, il est certain que l’Académie attire tous les meilleurs talents internationaux, tant les efforts accomplis par son directeur Philippe Jaroussky ont donné espoir et récompenses à de jeunes personnes qui nous éblouissent par autant d’adresse que de travail.

Le double concerto pour piano de Mozart, exécuté par Hyunhee Lee avec Guillaume Aubry sur piano Yamaha donne le ton : nous sommes dans l’excellence la plus haute. Le sensible Joseph Birnbaum sur concerto pour clavecin N°3 de Bach nous charme. Philippe Jaroussky exécutera un Vedro con moi diletto de Vivaldi comme le maître absolu qu’il est du chant contre-ténor. Le jeune K. Michalski au violoncelle n’a rien à envier à Anne Gastinel qui s’exécute après lui, en duo avec le flamboyant NemanjaRadulovic au violon. Toma Bervetsky égale ce fougeux maître d’une même adresse. Baptiste Bonfante baryton chantera Der Wanderer par cœur, un exploit.

 La Symphonie Espagnole de Lalo par Mariam Mnatsakanya, réveille toute la salle. Elsa Roux-Chamoux soprano à la voix perçante enchante Mozart. Le clou du spectacle sera le concerto pour piano N°2 de Saint-Saens où la jeune Bella Schütz exécute l’un des plus grandes performances au piano vue cette année, nous sommes ici dans le domaine de l’incroyable. Le professeur Cédric Tiberghien lui donnera la réplique avec un ardu Feux d’artifice de Debussy. Le Carmen Fantasy de Sarasate par Nika Toskan au violon enthousiasme une salle acquise, suivi par Julie Goussot soprano qui sera ovationnée sur du Massenet.

Nous nous sommes réjouis de ce spectacle qui annonce un début d’été radieux. L’Académie Philippe Jarrousky, une ambitieuse école pour tous, établie à 1, Ile Séguin, 92 300 Boulogne Billancourt.- www.academiejaroussky.org Photos Patrick Philippo et Bernard Ruault– Juin 2024

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Armide de Lully à l’Opéra Comique

Un opéra français enchanteur  Nous nous rendons avec grand plaisir à la générale d’un opéra très attendu à Paris, le fameux Armide de l’émérite Jean-Baptiste Lully, grand maître incontesté de la musique française du 17ème siècle, dont ce fût le dernier opéra, juste avant sa disparition. C’est son fidèle Quinault qui signera son livret, lui aussi avant de disparaître.

Nous voilà face à un monument des arts florissants français, et ce fût le premier opéra français donné en Italie, où la concurrence faisait rage. Du 17 au 25 juin, les ors brillants et les marbres lisses de la grande et majestueuse Salle Favart de l’Opéra Comique vont résonner de douces mélodies de ce magistral opéra tragique, un style inventé par le maestro Lully.

Faut-il encore présenter Armide, ce conte fantastique de Lully, où l’amour, la haine, les enfers se déchaînent pour conjurer le sort et les chaines données entre Armide et Renaud, preux chevalier croisé. La princesse syrienne Armide charme et rend captive les preux chevaliers chrétiens, le valeureux Renaud va libérer ses compagnons, avant qu’Armide tombe sous le charme du chevalier, une lutte infernale s’en suit, les démons étant convoqués pour donner une issue fatale à cette aventure amoureuse endiablée.

On se réjouit de retrouver les décors grandioses de Bruno de Lavenère. Si le spectateur a pu voir en 2022 le rare Armide de Gluck, ici un retour aux sources est réalisé par Christophe Rousset directeur musical et Lilo Baur metteur en scène, pour nous donner la joie de vivre un grand spectacle. On salue l’accompagnato qui met en valeur l’orchestre (une première), ces notes fines et subtiles de Monsieur Lully, qui fait d’Armide un chef d’œuvre, sans omettre le célébrissime Passacaille du Vème Acte, un monument.

Le chant et la danse sont liées à cet opéra, une première, Lully étant maître de ballet, également, il fera danser le roi Louis XIV lui-même. Ce bel Opéra des Dames revisité sous cette nouvelle mise en scène et ce noble décor sont les promesses de réjouissances sensorielles. 3 heures de grand spectacle, 5 actes et 1 prologue, sous le jeu dextre des TalensLyriques en orchestre et du chœur Les Eléments.

Nous sommes ravis de revenir découvrir sous les ors et les fastes de l’Opéra Comique cette tragédie en musique française en 5 actes et un prologue (à la gloire de Louis XIV), qui figure comme l’un des chefs d’œuvre de Lully et des arts français de son siècle. Le livret de Philippe Quinault originel est respecté, tiré de La Jérusalem délivrée du Tasse.

Sous la direction musicale du dynamique Christophe Rousset et la mise en scène de Lilo Baur, nous voilà face à une version moderne, minimaliste certes, mais qui n’en renvoie pas moins la puissance et l’ardeur du propos scénique. Les décors de Bruno de Lavénère sont repris dans cette version, à l’instar de cet arbre massif et oppressant par sa démesure. La chorégraphe Claudia de Serpa Soares fait preuve de sensualité et d’imagination pour donner l’impulsion à toute une troupe de danseurs qui font partie à part entière du spectacle, tantôt se mélant au décor, tantôt étant la force des enfers en action. Laurent Castaingt sait jouer de ses lumières subtiles pour révéler la puissance dramaturgique de l’action, qui s’enchaîne à vive allure.

Nous sommes séduits par ce grand opéra, une référence française et contemporaine. Triomphe immédiat à cette générale comme ce fût en 1686, où Voltaire, Diderot et Rameau en font de vives louanges. On regrettera simplement que le public ne s’habille plus pour aller à l’opéra et peut être cet appartéwoke où deux danseurs masculins miment la passion amoureuse. Le reste est fait à la perfection et nous enchante d’une musique révélée par l’orchestre, placé en fosse pour laisser tout le spectacle au public venu en nombre ce soir là.

Le casting principal est de plus impressionnants : AmbroisineBré, mezzo-soprano de talent, conquérante des grandes scènes internationales, remarquée par un album solo sorti en 2022 Psyché. Elle offre sa puissante présence scénique, jouant en opposition à Renaud incarné par Cyrille Dubois, ténor français de renom, qui clame avec force son amour pour la belle princesse de Damas.

Sept chanteurs lyriques vont évoluer autour de Renaud et d’Armide, on remarquera Anas Séguin baryton jouant la Haine, Lysandre Châlon baryton-basse donnant corps à Aronte et Ubalde, Edwin Crossley-Mercer baryto-basse jouant le roi Hidraot. Aux côtés d’Armide, Apolline Raï-Westphal est resplendissante de grâce.

Un spectacle riche, superbement joué par l’orchestre et les chanteurs, on appréciera davantage la partie d’après-entracte qui donne tout son faste au décor et à l’envol des jeux scéniques de la troupe. En parterre, nous avons la meilleure vue sur les artistes, malgré l’inconfort passager d’un strapontin. Le sous-titrage en français et en anglais est appréciable.

L’Opéra Comique signe indéniablement ici l’un de ses meilleurs opéras de la saison et nous salue pour l’été, nous avons hâte de les retrouver pour la rentrée. Nous rencontrons son directeur Louis Langrée à l’entracte qui nous confie certains détails architecturaux de l’édifice majestueux, comme cette reconstruction par les équipe d’Eiffel suite au second incendie ou cette loge privative appartenant aux descendants du duc de Choiseul qui céda son terrain pour que soit construit l’Opéra-Comique.

Derrière un décor résolument minimaliste, c’est le sentiment pur, le chant lyrique au plus haut de son art, la musique ravissante de Lully se révèle à nous, sous une forme donnée au sublime. On aime assurément la fraîcheur de cet opéra chanté, joué, dansé, par cette troupe d’excellence, merci encore !

Une création du 15 février 1686 reliftée que l’Opéra Comique rendre comme sienne, à bon droit, pour la sublimer. On appréciera le surtitrage en français et en anglais. Le Théâtre National de l’Opéra Comique, une institution vénérable des arts lyriques français, établie depuis 1714 au 1 place Boieldieu 75002 Paris. www.opera-comique.com - Juin 2024

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L’opéra Boris Godounov
au Théâtre des Champs Élysées

Un opéra magistral et fort  Nous nous rendons avec joie au Théâtre des Champs-Élysées, conviés à découvrir le fameux opéra russe Boris Godounov de Modeste Moussorgski, dans ce magnifique écrin que sont les os et le velours rouge de cette belle et grande salle parisienne des arts et spectacles d’exception.

S’il s’agit ici de la version initiale de 1869 de ce monument du répertoire de l’opéra russe, sa mise en scène, son twist moderne lui donne une fraîcheur et une gravité atypique en ces temps troublés, en résonance voulue avec l’actualité du continent européen. 

Nous sommes d’entrée bluffés par autant d’audace scénique, de grandiose sur scène, de magistralité  étonnante, avec des décors gigantesques, se renouvelant, nous voilà comme plongés dans un film. Nous sommes pris dès l’entrée dans un prisme résolument moderne d’une aventure dramatique folle et rageuse, qui va bousculer les destinées et les personnages. 

Chanté en russe mais sous-titré en français et en anglais, nous n’en perdons pas une seconde, passionnés par autant de vibrato et de flamboyance sur cette scène dorée et sombre. Par ce prologue d’ouverture, où l’on voit des soldats russes portant des kalachnikovs, le ton est donné : nous sommes en prise avec l’évocation de la triste actualité, même si le metteur en scène français et émérite Olivier Py, particulièrement doué, va nous faire vite oublier toute référence temporelle.

Ce compte fantastique qu’Alexandre Pouchkine se déroule devant nous, on aime l’uppercut de ces scènes graves, cet amour flamboyant, cette crise de conscience face à la violence des pouvoirs. Jeux, intrigues et fourberies mènent la danse des personnages multiples, nous sommes impressionnés par le nombre de chanteurs sur scène, sans oublier la grande famille de la Maîtrise des Hauts de Seine.

L’Orchestre National de France se donne à cœur joie pour lancer cette musique si forte, d’inspiration populaire russe, sans omette les douceurs requises à ces scènes d’introspection ou de tendresse. Le grand et fort Boris, devenu tsar par subterfuge, est vivement incarné par le géant Alexander Roslavets qui à lui seul tien sur ses fortes épaules tout cet opéra fantastique et magistral. Nous recevons une forte claque de réveil et d’émotions vécues à assister passionnément à cet opéra qui fût une première pour nous. 

Andris Poga de Lettonie à la direction, un biélorusse star sur scène, un auteur russe, nous sommes dans l’évocation d’une œuvre historique russe fondamentale de la culture de la Russie, nos remerciements au TCE de nous avoir fait partager un si fort moment de fougue et d’audace scénique, un opéra remarquable. Le Théâtre des Champs-Élysées, une belle institution des arts classiques, établie avec passion au 15, avenue Montaigne 75008 Paris. - www.theatrechampselysees.frAvril 2024

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Carmen
à l’Opéra Comique

Une réussite symphonique et esthétique  Les ors et velours rouges de l’Opéra Comique, notre salle préférée à Paris désormais, nous appellent à nouveau, sous l’aimable invitation de son service de presse. Le fameux opéra Carmen est donné, à savoir l’opéra français le plus joué au monde et le titre le plus programmé à l’Opéra Comique depuis sa création. 3 heures d’éclats, de sentiments à vif et d’amours croisés, un opus magistral écrit par Georges Bizet entre Paris et Bougival, présenté en première mondiale en 1875 à l’Opéra Comique justement !

 

Nous assistons ravis à la pré-générale, à savoir l’ultime répétition de cette joyeuse troupe de chanteurs et musiciens d’exception et de toutes les équipes affairées autour de Louis Langrée, son dynamique directeur, s’achèvent en ce vendredi soir une semaine de répétitions intenses, à savoir près de 6 heures par jour ! Les musiciens sont détendus, pas encore revêtus de leurs habits de spectacle, tout comme ce public d’heureux privilégiés venus nombreux.

 

Louis Langrée introduit à la salle cette ultime répétition avec public, pendant laquelle les artistes sont autorisés à «marquer», c’est à dire à ne pas chanter à pleine voix. Peu s’en faut, car déjà, les sonorités sont exceptionnelles.

 

Parmi les cigarières de Séville, Carmen la bohémienne, séduisante et fantasque, attire le regard des hommes, mais se refuse à eux, pour jeter son dévolu sentimental sur le brigadier Don José. Lequel épris de la belle, la laisse s’échapper suite à une altercation entre femmes. Il perd son grade, est emprisonné puis déserte pour rejoindre la bande de contrebandiers de la belle.

 

Carmen fait scandale à l’époque avec le portrait aguicheur de cette femme rebelle et affranchie. L’opéra comique en 4 actes fera son propre succès d’abord à Vienne, Bruxelles, Saint-Pétersbourg, New-York pour ne triompher à Paris qu’en 1883. Son génial compositeur n’en connaîtra pas les éloges mondiales car il décèdera à la 33ème représentation.

 

Ce Carmen reprend les codes de cet opéra archi-connu, basé sur une nouvelle de Mérimée, suivant un livret d’Henri Meilhac et de Ludovic Halévy. Il s’agit d’une production 2023 de l’Opéra Comique et une co-production de l’Opéra de Zurich.

 

Le ton brillant est donné avec cette première intro si connue et vivifiante. L’entrée magistrale de ces musiciens à 100 à l’heure, certainement l’ouverture d’opéra la plus connue au monde. La jeune cheffe Sora Elisabeth Lee s’en donne à coeur joie.

 

On aime ce beau duo enchanteur constitué par Gaelle Arquez en Carmen et de Frédéric Antoun en Don José, il fonctionne à merveille, nous sommes embarqués par leur action vive et franche. Une mention spéciale sera décernée à Elbenita Kajtazi en Micaela, attachante et présente scéniquement.

 

L’Orchestre des Champs-Élysées réalisera un sans faute, conduit par cette représentation pour la première fois par la jeune et brillante cheffe Sora Elisabeth Lee, qui constitue un spectacle à elle toute seule, emportée par une énergie fougueuse hors du commun, du moins peu commune aux chefs d’orchestres. Elle réveille les sens et on peut dire qu’elle fait le show. Elle sera à la direction en alternance avec Louis Langrée.

 

La mise en scène d’Andreas Homoki fait place à un minimalisme radical, sans décor presque, jouant les oppositions entre le mur de la manufacture de tabacs et les levers de rideau successifs. Les costumes de Gidéon Davey partent d’une époque victorienne, se balade au travers des époques pour évoquer des contrebandiers des années 40 pour finir en finale des années 90. Il caractérise ici l’intemporalité et même l’éternité de Carmen ou de sa symbolique féminine.

 

Le seyant Escamillo, le fameux toréador, chanté et joué par Jean-Fernand Setti est un colosse qui occupe une présence scénique remarquée. Il donne corps à ce personnage haut en couleur qui ne passe par inaperçu. Escarmillo bouscule tout sur son passage, entre en scène tel un fauve, il est un personnage qui introduit une vive dynamique à l’ensemble narratif, en garde !

 

Les costumes donneront l’effet de contraste voulu avec un décor résolument absent. On y mêlera des costumes victoriens, ibériques ou militaires, donnant forme à l’imagination libre de Bizet d’une Espagne idéalisée et fantasmée. La pré-finale réjouissante de toute cette troupe dynamique se fera en habits modernes, c’est un choix d’évolution thématique temporelle successive qui peu à peu se révèle à nous.

 

La jeune maîtrise de l’Opéra Comique joue à merveille, donnant un ton rafraîchissant à cette narration riche de rebondissements. Les effets comiques tombent à pic et l’on sent la passion du jeu des acteurs-chanteurs qui prennent plaisir à donner vie à cet opus célèbre. Le décor est volontairement minimaliste, pour donner toute sa place aux émotions brutes, à l’humain pur. Cela fonctionne avec efficacité. L’oiseau rebelle est entonné, nous retrouverons ce bel opéra si apprécié, avec cet air mythique et mondialement célèbre !

 

La finale est saisissante, cette scène terrible où Carmen est assassinée par Don José. Le chanteur-acteur joue à la perfection ce rôle. Le Carmen 2023 est un opéra particulièrement réussi, renouvelé, il donne un spectacle saisissant, à la hauteur de la réputation du savoir-faire de la troupe de Louis Langrée, félicitations ! L’opéra est utilement sous-titré en anglais.

 

Nos remerciements s‘adressent à Alice Bloch de l’Opéra Comique et à Patricia Herlander. Photographies Stefan Biron. Théâtre National de l'Opéra-Comique, une belle institution française établie depuis 1714 à 1 Pl. Boieldieu, 75002 Paris. www.opera-comique.com - Avril 2023

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L’Inondation
à l’Opéra Comique

Un opéra puissant  En ce 25 février 2023, nous nous rendons avec plaisir à la Générale de L’Inondation, le tout dernier opéra écrit par le fameux Joël Pommerat, ce metteur en scène français dont tout le monde parle. Après cette coupure du Covid, nous aimons retrouver l’ambiance feutrée et les ors scintillants de cette belle grande salle rouge, restée méconnue du public international et qui gagne à revivre aujourd’hui d’une programmation distinctive.

 

Nous voici prêts à assister à 2 heures sans entracte d’un opéra adapté de l’oeuvre d’Evgeni Zamatine, de 1929, où l’histoire se déroule à Saint-Pétersbourg, sur les bords de la Neva, qui s’apprête à déborder. Un travail d’écriture propre et singulier dont Pommerat a le génie d’en faire éclore les sentiments et l’émotion la plus pure, la plus brute aussi.

 

Nous sommes ici dans un répertoire résolument tragique. Il est vrai que nous sommes loin des opéras chantés classiques, un nouveau style naît. Celui d’un opéra social, décomplexé, simple, noir aussi, chanté en français, où la scène reproduit fidèlement la copie d’un immeuble social aux appartements superposés, où l’action de chaque habitant va prendre vie sous nos yeux, dans leurs gestes les plus quotidiens.

 

De cette monotonie apparente va naître un fin discours, narré ou en silences longs, ce qui peut désarçonner de prime abord. L’opéra-théâtre prend alors vie doucement, nous voici emportés par la narration de ces existences entremêlées, argumenté du jeu de 7 personnes en simultané sur scène. Le policier-narrateur appuie cette dimension cinématographique inédite, comme un polar noir, où la fin ne sera pas une happy end.

 

Le compositeur Franscesco Filidei signe ici son deuxième opéra et nous étonne de l’usage atypique de tous les instruments de l’Orchestre de Chambre de Luxembourg, réalisant des trucages et effets sonores unique, on remarquera même la présence d’un accordéon en orchestre.

 

Le jeu des acteurs-chanteurs est de qualité égale, on notera le jeu fin des acteurs principaux, dont le nombre est réduit afin de donner plus de puissance aux jeux de scène. Les costumes, ainsi que le décor est celui des années 70, sans qu’une temporalité puisse être attribuée à cette histoire de sentiments, de peines et de peurs.

 

L’argument tourne autour du coupe de Sofia et Trofim lesquels n’arrivent pas à avoir d’enfants. La vie les fait confronter soudainement au désir d’enfant, au désespoir, à l’adultère, la trahison et la mort. Si ces thèmes sont repris dans de nombreux opéras, leur traitement par Pommerat est atypique, faisant ressortir la quintessence de l’âme et des esprits.

 

Le décor et la mise en scène d’Eric Soyer est impressionnant, magistral, tel cet écran géant déployé qui mime l’inondation de toute une ville. Les enfants de la Maîtrise Populaire de l’Opéra Comique donnent la réplique à Chloé Biot (la femme, déjà présente en 2019), à Jean-Christophe Lanièce (l’homme), à Norma Nahoun, la jeune fille déjà présente en 2019. Le double de la jeune fille, jouée par Pauline Huriet, ajoute au coté dramaturge.

 

La création de ce nouveau genre opératique a début en 2016 alors que l’Opéra Comique est en travaux, présenté en 2019 puis repris cette saison pour cause de succès (une mise en scène reprise par Valérie Nègre). Pommerat s’est essayé à l’opéra dès 2015 avec Au Monde, sur production à l’Opéra Comique également (une adaptation directe) et s’est associé à Filidei qui lui a été remarqué par son premier opéra présenté à Porto en 2015, le Giordano Bruno. Une équipe d’excellence qui fonctionne.

 

Ces personnages ordinaires nous livrent une existence chargée, appuyée par une musique forte, digne de films à sensations, et renforcé par le cadre étouffant de ces appartements, tels de cubes de prison . Les chants seuls nous libèrent de cet environnement morne. L’argument est fort, on appréciera le second acte davantage, plus riche en émotions sincères. La finale, caractérisée par le décor de l’hôpital, se livre en fin comme une chute, fatale, là ou la femme muette se libère de son ultime fardeau.

 

Le coupe adopte une orpheline voisine, puis l’homme s’attache à cette nouvelle ingénue, mettant à mal son couple, l’inondation de la Neva apporte la destruction, puis la création, change les paradigmes, le retour à la normale ne sera que de courte durée, la femme tombant dans une folie destructrice et macabre.

 

Un opéra saisissant et magistral, qui ne laisse pas indifférent. La mise en scène est forte et bien réalisée, on peut parler d’opéra-choc. Les sons répétitifs de l’usine soutiennent cet univers ouvrier qui siège à la nouvelle de l’auteur russe. La direction musicale de Léonhard Garms est irréprochable. Pommerat signe ici une nouvelle œuvre majeure, provocante, après Thanks to my Eyes (2011) et Pinocchio.

 

On apprécie le double surtitrage anglais-français du spectacle, sous cette riche coupole dorée qui a vu naître les œuvres de Massenet, Puccini et Debussy. Nos reviendrons avec plaisir pour assister à Carmen en avril en ces mêmes lieux. Nos remerciements s’adressent à Alice Bloch et à Louis Langrée de l’Opéra Comique. Photos: S. Brion. Le Théâtre National de l'Opéra Comique, un haut lieu des arts lyriques français depuis 1714, établi avec panache à 1 Pl. Boieldieu, 75002 Paris – www.opera-comique.com - Mars 2023

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Alcina de Haendel
à la Philharmonie de Paris

Un majestueux opéra-concert  Après un long intermède de Covid, nous avons plaisir à nous rendre à nouveau dans la belle salle de La Philharmonie de Paris, qui nous réjouit à chaque fois de beaux évènements éclectiques. C’est un célèbre opéra de Haendel qui nous attire, bien que la musique ancienne peut être rebutante d’un prime abord, les musiciens feront ici jeu de virtuosités somptueuses qui raviront toutes les oreilles.

 

Nous déambulons entre les coursives immaculées et boisées de cette salle-cathédrale, temple consacré de toutes les musiques classiques en visite à Paris. Aujourd’hui, c’est alliance réussie d’un plateau national et international qui se présente à nous: Marc le bordelais, les Musiciens du Louvre grenoblois et une pléiade de cantatrices et de beaux chanteurs internationaux, et non des moindres.

 

Il s’agit d’un magnifique Dramma per musica en trois actes, ici en deux parties de 1H45 et 1h25 chacune, du fameux auteur germano-anglais Georg Friedrich Haendel, établi sur un livret d'Antonio Marchi, un opéra sous forme de concert, une modalité scénique qui permet d’apprécier la pureté des voix et la résonance d’une belle musique, faisant abstraction des décors et des mises en scène.

 

Cette histoire fantastique de sorcière qui transforme les hommes en pierre valut un grand succès à Haendel lors de sa création, mais tomba ensuite dans l’oubli jusqu’en 1957 ! Nous avons plaisir à le découvrir ici pour la première fois. En ce mardi 7 février 2023, dans cette belle et grande salle Pierre Boulez, cette grande fresque de l’amour passionnel constitue un beau prélude à une célébration de la Saint-Valentin consacré quelques jours après.

 

Les Musiciens du Louvre, une dynamique formation française de vertueux musiciens placés sous la direction aimante du célèbre Marc Minkowski, chef star est secondée par un casting vocal de rêve: Magdalena Kožená en Alcina, Erin Morley joue Morgana, Alois Mühlbacher est Oberto, Anna Bonitatibus sera Ruggiero, Elizabeth DeShong incarne Bradamante, Valerio Contaldo fait figure de Oronte et Alex Rosen est un beau Melisso. Un panel qualitatif d’une production haut de gamme.

 

Très vite, on se retrouve enveloppés dans cette belle musique onirique, transcendante, on se joue à fermer les yeux et à se projeter dans de nouvelles contrées sensorielles, le rêve nous emporte, nous voilà bercés par ce conte merveilleux et unique. Certes rempli de retournements et de drames mais pour connaître un dénouement bienveillant, un happy end avant Hollywood.

 

Le conte fantastique est inspiré de l’Arioste Orlando furiosi (un operia seria) de 1615, il y conçoit le personnage de la magicienne Alcina, une nouvelle Circé qui transforme ses amants en bêtes fauves et en rochers. La feinte des sentiments, le tournoiement de l’amour, les coeurs épris et désespérés s’entrechoquent ici dans cette jolie création inspirée des opéras florentins.

 

Mirages, illusions et métamorphoses baroques font foison dans ce joli opéra, créé la première fois au Théâtre de Covent Garden à Londres le 16 avril 1735, avec une consonance internationale dès sa mise au monde: un livret en italien, adapté d’un opéra du frère du célèbre Farinelli, Riccardo Broschi. Le jeune Haendel a été pétri d’opéras du bel canto et consacre dès la première d’Alcina une distribution internationale : des chanteurs lyriques italiens, anglais, une basse allemande, des danseurs français dont la célèbre Marie Sallé.

 

On ne présente plus le génie Haendel: organiste à 17 ans en Allemagne, il créé un premier opéra à Hambourg, Almira, puis, invité par un Médicis en Italie, il s’épanouit, il est vite remarqué à Londres en 1711 avec Rinaldo, il conçoit une quarantaine d’opéras et en 1741 il écrira même en anglais, Le Messie, ce naturalisé anglais sera inhumé à Westminster comme les rois !

 

L’opéra version concert est long certes mais nous décidons quand même de vivre la deuxième partie, bien nous en fait, nous apprécions vraiment ce concert après une nécessaire immersion paisible dans cet univers musical, nouveau pour nous. On apprécie ces instruments anciens qui donnent toute leur puissance et résonance. On ne s’ennuie pas, tout se passe vite, nous sommes comme portés par un doux rêve. La mélodie est harmonieuse et nous communique cet enclin à la pensée douce, bercés par ces voix étincelantes qui surpassent les accords fins de l’orchestre jouant à l’unisson.

 

Les Musiciens du Louvre, une formation élitiste basée à Grenoble, est fondée en 1982 par Marc Minkowski, elle faitt revivre des répertoires baroques, classiques et romantiques sur des instruments d’époque dont ils sont les grands spécialistes en France, ils se font remarquer par leur relecture des œuvres de Haendel, Purcell et Rameau, de Bach et Schubert. Leur programme 2021-2022 füt consacré à la musique française (Le Bourgeois Gentilhomme de Lully/Molière, La Vie Parisienne d’Offenbach). Cet opéra Alcina en version de concert sera joué en tournée à Paris, Bordeaux, Barcelone, Valencia. Ils produisent plusieurs disques sur Mozart, Rameau, notamment.

 

Théorbe, cors, bassons, flûtes, altos résonnent, on aime la prestation scénique de sa première violon et du solo de violoncelliste sur scène, des effets spéciaux sont intégrés aux instruments dans l’opéra, mimant le tonnerre ou un fauve, on adore cette créativité. On notera le jeu fin des deux clavecins de Maria Shabashova et Yoann Moulin qui jouent face à face, tel un beau duo masculin-féminin.

 

Nous profitons yeux et sens ouverts de ce spectacle rare et grandiose: un orchestre symphonique complet joue devant nous, secondé par cette dizaine de chanteurs expérimentés qui nous encensent par leurs voix brillantes et assurées. Un parfait mix duo qui créé une mélodie fantastique et sublime, nous sommes épatés et comblés devant autant de sentiments vrais et de grâce accomplis.

 

Cette grande et immense salle en rotonde, chaleureuse, ouverte à 360 degrés sur la scène est l’une de nos préférées à Paris. On y rencontre un public varié, jeune et moins jeune. Cet opéra est particulièrement long, mais aussi riche. En 2 parties séparées d’un entracte bien mérité, on trouvera la seconde plus émouvante. Bien assis, on profite d’une vision directe claire à ce 1er Balcon, certains font appel à des jumelles. Le surtitrage en français nous permet de suivre la dramaturgie qui consacre un symbole de la libération de l’Homme de la nature.

 

Marc Minkowski, connu pour avoir dirigé l’Opéra National de Bordeaux comme le festival Ré Majeure, fût également directeur artistique à Salzburg et au Japon. il fonde à 19 ans seulement les Musiciens du Louvre, un surdoué, part active au renouveau baroque, travaille avec Bob Wilson sur le Messie 2020. Alcina sera naturellement présenté à l’Opéra de Bordeaux 2 jours après Paris.

 

On remarque la voix impressionnante de clarté de Magdalena Kozena, qui s’est produite notamment au Carnegie Hall, découverte en 1995, elle fût formée au Conservatoire de Brno, a joué avec les célèbres Orchestre de Cleveland et de Philadelphie, consacrée à l’opera en 2022 Don Giovanni dans le rôle de Zerlina, elle suivra la tournée sud-américaine d’Alcina

 

Alois Mühlbacher se distingue également particulièrement dans cet opéra, ce jeune contre-ténor, né en 1995 en Autriche est flamboyant sur scène ! Il débute au Staatsoper de Vienne à 15 ans, il est proche de l’Ars Antiqua Austria et connaît une carrière internationale remarquée. Nous aimons également Valerio Contaldo, par sa puissance vocale distinctive, il a été formé au Conservatoire de Lausanne, il s’est produit avec William Christie, un artiste remarquable.

 

Nos remerciements pour cette très belle soirée s’adressent à Mathilde Kalb et à Isabelle Lelaidier du Service Communication de La Philharmonie / Cité de la Musique. Crédits photos : Gil Lefauconnier, Marco Borgreve, Benjamin Chelly, Julia Wesely. La Philharmonie de Paris, une grande et belle salle parisienne établie avec brio au 221 avenue Jean-Jaurès, 75019 Paris – www.laphilharmoniedeparis.frFévrier 2023

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Le lys et le chardon
Le Palais Royal

Un concert magistral  Nous avions pu apprécier l’ensemble du Palais Royal en juillet 2021 dans la cour d’honneur du lycée Buffon, pour un tour de chant célébrant le style et le lyrisme français (Deux hommes et une femme), puis en octobre dernier pour en l’église Saint-Germain-des Prés pour invoquer la Virtuosité baroque. Nous avons cette fois-ci retrouvé Philippe Sarcos et son orchestre avec grand plaisir dans la salle du Premier Conservatoire, rue du Conservatoire.

Ce monument grandiose est ignoré de la plupart des Français, voire des Parisiens. Le Palais-Royal y donnait son 51ème concert depuis 2013. Un match à domicile en quelque sorte. Parmi les premières salles de concert en tant que telles construites en France – et pas comme salle d’Opéra – elle fut inaugurée en 1811. La salle du Conservatoire jouxtait l’Hôtel des Menus-Plaisirs bâti en 1763 d’abord pour y préparer les bals royaux puis, à partir de 1787, pour y loger une compagnie d’art dramatique. L’ancêtre de l’actuel Orchestre de Paris – la société des concerts du conservatoire – donne son concert inaugural en 1828 en y jouant la Symphonie héroïque. Depuis lors, cette arène de pur style pompéien a été classée monument national. Elle subsiste malgré les incendies ayant ravagé le quartier et les projets de destruction ou de déménagement.

Le spectacle du 16 mars auquel nous avons insisté s’intitule Le lys et le chardon. Le lys pour Camille Saint-Saëns. Le chardon pour Felix Mendelssohn. Soit les deux compositeurs joués ce soir-là. Le lys, symbole de la royauté française pour Saint-Saëns, grand patriote ayant fondé en 1871 la société nationale de musique pour contrecarrer l’omniprésence de la musique allemande dans les concerts en France. Ah, cette antique et masochiste manie française de mécaniquement lorgner vers l’étranger … Le chardon pour … l’Allemand Mendelssohn, aîné et modèle du premier. Car vers l’âge de 20 ans, circa 1830, et après avoir réussi des études aussi rapides que brillantes, le jeune Félix, rejeton d’une opulente et brillante famille, obtint le droit se réaliser une sorte de grand tour à travers l’Europe qui le mena finalement en Ecosse. En plein triomphe romantique, l’Allemand tomba amoureux des Highlands écossais vêtus de landes et sertis de rochers, de cavernes, de lacs et de bruyères. Ce paysage lui inspira la symphonie n°3 dite écossaise, en hommage à Marie Stuart et à la reine Victoria.

Dans une sorte de chronologie inversée, c’est le concerto n°2 en sol mineur de Saint-Saëns qui est d’abord interprété, avec le virtuose Orlando Bass au piano. Ce moment nous a époustouflé. L’orchestre et le soliste, en robes et habits de soirée, jouent sur des instruments anciens, et notamment sur un piano fort ancien de la maison Erard (qui a depuis lors fermé), contemporains de Saint-Saëns. Il s’ensuit une sonorité authentique et peu conventionnelle, en particulier pour le piano qui est moins cristallin que d’habitude. L’émotion est totale, le temps comme suspendu. Nous avons pu confirmer que la jointure entre la fin du 19ème siècle et le début du 20ème constitue l’âge d’or de la musique française avec, outre Camille Saint-Saëns, Satie, Debussy, Fauré, Ravel, Franck, Poulenc, Milhaud, Chausson et nous en oublions sans doute.

La deuxième partie, consacrée à la symphonie écossaise Mendelssohn, pourtant indiscutable génie et inspirateur de Saint-Saëns, nous a moins bouleversé, mais tout cela est affaire de goût personnel. Nous avons passé un magnifique moment et recommandons ce spectacle comme tous les spectacles du Palais-Royal et de son sémillant, didactique et brillant chef d’orchestre. Un grand spectacle frais et réjouissant. Nos remerciements au Palais Royal et à notre rédacteur Frédéric Casotti - www.le-palaisroyal.com - Mars 2022

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Le Palais Royal à Saint-Germain-des-Près

Un concert de grâce intimiste  Le Palais Royal, cette jeune formation exubérante de passion et d’audace aime nous surprendre. Elle fait jeu d’inventivité et d’originalité pour nous livrer des concerts qui font date et mémoire. C’est le cas de ce concert doux et chaleureux donné en l’église-abbaye de Saint-Germain-des-Près ce 5 octobre au soir. Nous voici de nuit, déambulant sous les ors et les couleurs de cette église qui porte en elle 1500 ans d’histoire et de foi, complètement restaurée. La célébration parfaite pour ce concert de rentrée musicale, faisant église comble.

Nous avions pu acclamer l’ensemble le Palais Royal en juillet dernier, au cours de son concert de reprise dans la cour d’honneur du Lycée Buffon, et déclarer notre enthousiasme. Rendez-vous est cette fois pris en l’église Saint-Germain-des prés, au cœur du quartier éponyme, pour un récital de musique baroque. L’église abbatiale, dont les fondements datent du VIème siècle et qui fut nécropole royale jusqu’à l’édification de la basilique de Saint-Denis, a été entièrement rénovée, et constitue l’écrin idoine de ce concert, puisque qui dit musique baroque dit presque nécessairement musique chrétienne. Notamment, la majorité des morceaux interprétés par le chœur et l’orchestre ont un caractère, une finalité et une consonance religieuse.

Quel charme cette mise en espace et en scène sous le signe des bougies donnant immédiatement une ambiance romantique, tout en cédant à la mode parisienne actuelle des concerts aux bougies pour notre plus grande émotion, le Palais Royal nous livre un concert sous l’égide des baroques italiens. Une musique rare et recherchée qui ouvre les coeurs et les esprits, dont la douceur nous portera de longs jours encore.

Apparaît le flamboyant Jean-Philippe Sarcos, général jovial de cette armée de talents frais et souriants. Habillé comme un matador hispanique, il nous compte les merveilles de chacun de ces titres présentés, agrémentés de ses anecdotes croustillantes, on se délecte de ce format didactique et atypique.

Jean-Philippe Sarcos est le fondateur, le directeur musical et le chef d’orchestre du Palais Royal depuis 1996. A titre personnel, nous nous rendrions aux spectacles de son ensemble rien que pour l’écouter. Ce musicien brillant (premier prix du Conservatoire, formé ou ayant collaboré avec les plus grands chefs d’orchestre du monde) est un homme fort éloquent et un passeur. La précision de son verbe n’a d’égal que la gourmandise de son propos. La chatoyance de son accent renforce le brio de son art oratoire. Drapé dans une sorte de kimono qui lui fait ressembler à un moine bénédictin voire shaolin, Philippe Sarcos nous rappelle que le spectacle – Virtuosité baroque - est placé sous le signe du virtuose. Il nous apprend que virtuosité et vertu possèdent la même racine : vir, soit ce qui se rapporte à l’homme.

 

Donc pour paraphraser Buffon, la virtuosité, c’est l’homme, en ce sens qu’elle ne constitue point « une technique développée au seul service de la gloire de l’interprète », sinon « un des moyens géniaux dont usèrent les artistes italiens pour traduire les mouvements passionnés de leur âme ». Un propos presque provocant en ces temps d’égalitarisme forcené, de règne de la quantité et d’effacement de la culture en tant que prétendu instrument d’oppression … La virtuosité se déclinera alors sous tous ses aspects au cours de la soirée : virtuosité instrumentale (Corelli), virtuosité vocale (Rubino), virtuosité d’écriture (Scarlatti, Lotti).

Le concert commence par un hymne processionnel où les dix chanteurs de la soirée vont déambuler en procession à la bougie dans l’église, au milieu du public, jusqu’à prendre la chair oratoire comme estrade d’annonciation, joyeuse.

Le concert baroque peut alors commencer. A la lueur des bougies qui illuminent par intermittence leur face, les musiciens débutent Iste confessor de Domenico Scarlatti. La voix cristalline de la soprano, montée en chair, irradie dans la nuit germanopratine. Le reste du chœur déambule ensuite, comme marchant sur le flot de cette musique sacrée. Suivront des morceaux de compositeur plus ou moins demeurés à la postérité (Uccellini, Rubino, Lotti, Corelli). Le clou du spectacle – qui raisonnera au mitan de celui-ci comme un pic avant de nous faire progressivement redescendre sur la terre des Hommes – est le Stabat Mater de Scarlatti. Moins connu que celui de Pergolèse ou de Vivaldi, il présente la prouesse créatrice d’être écrit pour dix voix, non point en canon ou en silo, mais superposées. Une demi-heure durant, cette polyphonie nous enivre, ne laissant à l’auditeur, pour son plus grand bonheur, aucun répit.

Une première pour nous de voir un concert sous cette forme, nous sommes comme de petits enfants. Les lumières des bougies renvoient les ors des voûtes de l’église, sous le jeu des arrangements d’Olivier Oudiou. Les costumes de Véronique Boisil nous transportent dans le temps avec ces jolies robes inspirées d’époque et pour les hommes des chemises noires à jabots et dentelles. Six instruments feront vibrer avec délicatesse le public, violons, violoncelle, contrebasse, théorbe, orgue, nous noterons l’adresse du joueur de théorbe qui alternera souvent deux instruments sur un même morceau.

Le premier morceau en chœur sera une danse joyeuse du 17eme très connue en Europe, une chaconne à 4 mesures identiques, un air de légèreté vivifiant. Y succèdera le Sabat Mater de Scarlatti, né en 1685 comme Bach et Haendel, dont cette œuvre magistrale fût l’une des rares qui fût sauvée de l’incendie de la bibliothèque de Lisbonne. Un moment fort de ce concert, donné à 10 voix, une vraie prouesse.


25 minutes de Stabat Mater de Scarlatti, 12 minutes du Credo de Lotti, Uccelini, Rubino, Corelli et pour finir une finale Laetatus Sum de Vivaldi, nous ont fait voyager dans l’Italie du baroque dans toute sa splendeur. 1H15 de pur plaisir, présentant 17 musiciens et chanteurs de talent sur scène. En harmonie avec ces lieux solennels, le programme est résolument spirituel, comme le Lauda Jerusalem de Rubino, la Sonate d’église Op.3 de Curelli ou le Crédo de Lotti. Rien de mieux pour célébrer cette église qui est l’une des plus anciennes d’Europe.

On ne présente plus Jean-Philippe Sarcos en ces pages, ce surdoué de la direction musicale, élève de William Christie, on aime son humilité, lui qui se rend disponible après chaque concert. Ces chanteurs sont impressionnants de jeunesse et de courage, chantant sans partition, ce qui ajoute à la proximité au public. Depuis 8 ans, cette formation qui monte est un formidable passeur d’histoire. Nous les retrouverons cette saison avec Deux hommes et une femme ou encore avec le Requiem de Verdi. Humanité et partage sont les maître-mots de cette formation qui nous inspire, les Apprentis d’Auteuil réalisent ainsi les candélabres de cette jolie prestation scénique.

Il est 22 heures et le spectacle s’achève. Nous buvons un verre à une terrasse du boulevard Saint-Germain. Qu’il est doux de constater parfois que certaines choses paraissent intangibles et que, comme le disait Péguy, tout ce qui élève unit. Nous recommandons vivement ce spectacle. Un concert virtuose tenu en l’Eglise de Saint-Germain des Près, 75006 Paris www.le-palaisroyal.com - Octobre 2021

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Le Palais Royal revient sur scène

Enfin sur scène  Quelle joie de retrouver ce dynamique groupe de chanteurs et de musiciens passionnés qu’est le Palais Royal. Élégance, jeunesse et adresse rythment les pas et les concerts de ces jeunes talents qui nous impressionnent toujours. Créativité, dynamisme et sérénité sont les maîtres-mots de ce groupe aux ressources riches et grandissantes.

 

Quoi de plus beau qu’une invitation d’été pour un concert classique en plein coeur de Paris, une invitation nocturne à de douces rêveries, certainement un moment mémorable de cette saison.

 

Le dynamique Palais Royal revient sur scène dans la capitale avec l’artiste Kévin Amiel dans Deux Hommes et une Femme. Il s’agit ici du premier concert parisien de la formation du Palais Royal depuis de longs mois, qui se tiendra le mercredi 7 juillet 2021 à 20h30 dans la cour d'honneur du célèbre Lycée Buffon (Paris 15ème).

 

Au riche programme des réjouissances annoncées, des airs, duos et trios d'opéras français, dont Gounod, Bizet, Massenet, Offenbach, Messager (Faust, Carmen, Les Pêcheurs de Perles, La Belle Hélène, Mignon, Véronique...), interprétés avec grâce par l’orchestre du Palais Royal en formation symphonique (dont une harpe !). Parmi les airs connus et reconnus, l’ouverture de la Belle Hélène d’Offenbach, Carmen de Bizet, les Remparts de Séville et à noter, Plaisir d’Amour sur une orchestration d’Hector Berlioz,

 

Le programme Deux hommes et une Femme a été conçu par Jean-Philippe Sarcos autour du ténor français Kévin Amiel, qui sera assisté de deux jeunes chanteurs, Marion Vergez-Pascal (mezzo-soprano) et Adrien Fournaison (baryton-basse).

 

Des retrouvailles en présenciel tant attendues autour de l'opéra français, avec des duos et trios extraits de Carmen et des Pêcheurs de Perles de Bizet, des airs et ensembles d'Offenbach (La Belle Hélène, La Périchole) et de Gounod (Faust), mais aussi des pages moins connues de Félicien David (Herculanum), Messager (Véronique) ou encore d'Ambroise Thomas (Mignon). La mise en espaces d'Olivier Oudiou permet de créer une trame dramatique pour lier les extraits entre eux autour de ces trois solistes d’exception.

 

On notera donc la présence très remarquée de Kévin Amiel. Nommé aux Victoires de la Musique classique 2020 dans la catégorie "Révélation Artiste Lyrique" et lauréat de nombreux concours de chant, le jeune Kévin Amiel a été tour à tour Nemorino (L’Élixir d’amour) et Alfredo (La Traviata) au Théâtre du Capitole de Toulouse, Nadir (Les Pêcheurs de Perles) au Teatro Regio de Turin, Flavio (Norma) à l'Opéra de Rouen, mais encore de nombreux autres rôles aux Opéras de Marseille, Montpellier, Bordeaux et Toulon. Un jeune talent à suivre assurément.

 

Nous avons reçu un extrait vidéo de ce concert brillant, réalisé au Petit Palais en février dernier, le duo vif "De-ci de-là" extrait de Véronique de Messager avec Marion Vergez-Pascal, agréable mezzo soprano originaire du Pays Basque et Adrien Fournaison, brillantissime, tous les deux accompagnés de l’incroyable virtuose Orlando Bass au piano, un artiste attachant déjà très remarqué dans nos écrits. Ainsi que la douce romance Plaisir d'amour de Martini interprétée par Adrien Fournaison, plus romantique et mélancolique. Un doux moment de sensibilité et de tendresse complice.

 

Nous réjouissions enfin de retrouver sur scène le Palais Royal, cet élégant et dynamique ensemble pour leur concert de reprise le 7 juillet à l’intérieur du lycée Buffon, dans le 15ème Arrondissement. La joie fut à la hauteur de l’attente. Face aux deux colonnes de spectateurs divisées en rangées, les musiciens, en habits et robe de soirée, attendaient, sans doute aussi fébrilement que nous, le départ de leur saison estivale. Ils étaient chargés d’accompagner les voix du Palais Royal, le ténor français Kévin Amiel, la mezzo-soprano Marion Vergez-Pascal et le baryton-basse Adrien Fournaison.

 

Avant que le crépuscule ne se répande sur la cour d’honneur du plus vaste lycée parisien, le directeur musical et chef d’orchestre Philippe Sarcos a pris la parole tant pour présenter le programme que pour exposer le particularisme de la musique et de l’art lyrique français, thème exclusif du concert. D’emblée la douceur et l’élégance de son accent occitan coloria la grise enceinte de l’établissement. Avec la gourmandise du passionné et la précision de l’érudit, il nous entretint de «l’élégance», de «l’aristocratie» et de la «retenue» du style français, par opposition à la complétude du style allemand ou à l’essence populaire de la musique italienne. Il laissa le concert débuter puis nous narra les déconvenues ou au contraire les gloires révolues des musiciens dont les œuvres seraient jouées.

 

Comme le programme et nous même l’annoncions, ce fut une suite parfaitement calibrée d’airs, de duos et de trios d’opéras français célèbres - Gounod, Bizet, Massenet, Offenbach, Messager (Faust, Carmen, Les Pêcheurs de Perles, La Belle Hélène, Mignon, Véronique...) … il y eut aussi du Berlioz, mais également des partitions de musiciens maîtres en leur temps mais quelque peu tombés désormais dans l’oubli: Félicien David (Herculanum), Messager (Véronique) ou encore Ambroise Thomas (Mignon). Un «pari brûle-t-il» de Maurice Jarre retentit aussi. Le harpiste de l’orchestre improvisa un très long solo. Ce fut un moment fort du spectacle. La mise en espaces d'Olivier Oudiou avait permis de créer une trame dramatique pour lier les extraits entre eux autour de ces trois solistes d’exception.

 

Il est 22 h 30. Le spectacle débuté avec retard s’achève. La nuit est douce. Ce moment de grâce et d’élégance s’achève par un «pot» en compagnie des musiciens dont la simplicité surprend. Ce fut pour nous une très grande joie de renouer avec la saison culturelle. La musique était magnifique, Marion Vergez-Pascal d’une très grande grâce. Nous recommandons vivement ce spectacle.

 

Nous nous sommes délectés d’assister à ce grand concert en plein air d’1h15, conçu avec passion autour de 38 artistes enthousiastes placés sous l’émérite direction de Jean-Philippe Sarcos. Nos remerciements à Jean-Baptiste Blocquaux, chargé de projets pédagogiques. Nos remerciements vont aussi à notre émérite rédacteur Frédéric Forgues. Crédits: Nabil Belhadj. Le Palais Royal, une formidable institution du classique français établie avec brio au 3, rue Vineuse 75116 Paris – www.le-palaisroyal.comJuillet 2021

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Giocoso
par le Palais Royal

Un bel hommage classique  Nous sommes heureux, en ce début d’année 2020 de nous rendre dans l’élégant quartier du 9ème arrondissement dans la salle d’un des plus beaux Conservatoires de Paris. En cette soirée de mars, c’est avec plaisir que nous sommes invités à admirer le Giocoso, pastiche mozartien en trois actes, parmi une riche programmation classique la dynamique et jeune formation du Palais Royal. Organisé comme un pasticcio, mêlant intrigue et costumes, le spectacle se construit sur plusieurs airs et duos des derniers opéras de Mozart chantés en français pour l’occasion. C’est une chance pour nous de redécouvrir de fameux airs d’opéra en toute intimité. Déjà plongées dans la grâce et la délicatesse de ce beau conservatoire, nous sommes prêtes à contempler l’œuvre de Mozart.

Le Giocoso c’est avant tout l’histoire d’un amour. Nous suivons les aventures de Diavolina, perfide séductrice, Manabella, jeune femme au cœur aimant et sincère, ainsi que du Compte. C’est alors l’occasion pour nous de découvrir un superbe trio de solistes qui mènent la danse ce soir, accompagnés par un orchestre juste et talentueux. Chaque extrait est superbement interprété et agrémenté par la pétillance des artistes qui se laissent mener par les notes classiques pour nous offrir une prestation originale et personnelle.

Les spectateurs quant à eux, sont portés par le narrateur qui conte l’histoire, toujours avec un ton subtil et malicieux. C’est comme si nous assistions à un jeu de marionnettes, dirigées par la voix grave du conteur et par nos rires. Il est très agréable d’assister à ce spectacle car c’est comme si nous nous plongions au cœur de l’univers de la musique classique grâce à la mise en scène, aux costumes et à l’ambiance générale de ce conservatoire historique édifié en 1811. La Salle historique du Conservatoire est l’une des premières salles de concert de l’histoire construite pour le concert et non pour l’opéra offrant une qualité acoustique sans pareil, c’est pour cela qu’elle fut même surnommée le « Stradivarius des salles de concert ». Ce lieu est chargé d’un passé musical illustre, à nul autre comparable : c’est en effet dans cette salle que les symphonies de Beethoven furent entendues pour la première fois en France, et que fut créée la Symphonie fantastique de Berlioz ainsi qu’une très grande partie de la musique française du XIXe siècle.

Endroit idéal pour rendre hommage à l’un des compositeurs les plus illustres de son siècle (et bien plus encore), chaque membre du spectacle trouve sa place et accompagne les autres en douceur. Le piano-forte excellent Orlando Bass nous livre une prestation réjouissante qui nous transporte avec talent en commençant par une très belle ouverture improvisée autour de l’Ouverture de La Clémence de Titus. Jeune prodige de la musique classique, il remporte le Grand-Prix du concours-festival à Paris en 2016, le Premier Prix du Concours Les Virtuoses du Cœurs de la même année et le premier prix du concours de Bologne en novembre 2015. C’est donc sans aucun doute que les talents sont au rendez-vous pour accompagner trois solistes aussi ingénieux.

La soprano Julie Mathevet interprète la piquante Diavolina en lui donnant une personnalité unique et charmante. “Miracle lyrique”, c’est ainsi qu’elle est qualifiée par la presse américaine, elle mène aujourd’hui une belle carrière internationale et nous offre ici une prestation haute en couleur. Elle est accompagnée par Charlotte Mercier, mezzo-soprano, membre du Palais Royal depuis 2003. Elle se produit dans des rôles des plus prestigieux tels que Carmen ou Siébel de Faust au Cirque d’hiver à Paris. Enfin, le baryton Laurent Deleuil est renversant de présence en Don Giovanni et en Comte et nous livre un rôle drôle, plein de tendresse et précise.

Sous la direction musicale du talentueux Jean-Philippe Sarcos qui nous réjouit de ses belles introductions aux spectacles et la mise en scène Pénélope Driant, l’équipe riche du Palais Royal est, encore une fois, une source de plaisir, de brio et d’authenticité. L’oeuvre oscille entre classique et modernité et elle est illustrée par de très beaux costumes, qui ont ici un rôle majeur.

Nous avons été ravies d’assister à cette malicieuse représentation et nous en remercions Lucie Badin, chargée de mécénat et d'actions culturelles. Vivement le prochain concert du Palais Royal ! Pour aller redécouvrir l’univers de la musique classique revisité, rendez-vous sur le site internet de l’académie du Palais Royal www.le-palaisroyal.com. Un spectacle donné à la Salle du Conservatoire, 2bis rue du Conservatoire 75009 Paris. - Mars 2020

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Virgil Boutellis-Taft
à la Salle Gaveau

Virgil Boutellis-Taft, le pouvoir magique de la musique Nous sommes ravis en ce lundi soir, de nous rendre à un concert de musique classique, cette force unique et impalpable, qui va droit au cœur, capable d’exprimer l’inexprimable. C’est dans la mythique salle Gaveau, dédiée à la musique classique que le violoniste Virgil Boutellis-Taft accompagné des solistes du Royal Philharmonic Orchestra, et de la sublime pianiste Rieko Tsuchida, nous présente ce soir Incantation, son dernier album sorti le 21 février 2020.

 

Quel plaisir de nous retrouver dans cette magnifique salle, accueillis par son orgue majestueux et ses sièges bouton-d’or. Restaurée en 1976 grâce à la passion d’un couple de musiciens, Chantal et Jean-Marie Fournier, qui après la faillite de la maison Gaveau, décident de sauver la salle, in extremis de la menace d’un parking.

 

Nous sommes fiers de découvrir ce musicien français au tempérament de feu, qualifié par la critique de violoniste hors pair, au son intense, brillant et somptueux. C’est à l’âge de 6ans qu’il commence ses études de piano et violon, pour ensuite rentrer à l’âge de 9 ans au conservatoire de Tour. Il décrochera son premier prix du conservatoire supérieur de Paris à 16ans et obtiendra son artist Diploma au prestigieux Royal College of Music de Londres en 2007.

 

Le violoniste nous présente son album pour la première fois à Paris, nous sommes heureux de vivre ce moment unique, où l’on oublie tout, une bulle, une parenthèse ou nous sommes tous ensemble pour la même cause, l’émotion, tous les yeux sont rivés sur ce virtuose qui nous fait vibrer par son talent.

 

Qui n’a pas été un jour émerveillé par la magie ou intrigué par le chamanisme, les incantations éveillent en nous une part de mystère et de fascination, c’est ce que nous procure ce soir le chant du violon de Virgil Boutellis-Taft.

 

L'artiste tient ses promesses, en ayant sélectionné les œuvres les plus magnétiques de l’époque baroque à nos jour. Les sons répétés servent l’incantation et retiennent notre attention, comme dans la première œuvre qu’il choisi de nous interpréter, Kol Nidrei de Max Brunch, une prière judaïque d’annulation de vœux.

 

Dans la célèbre Méditation de Thaïs de Jules Massenet, nous vivons un véritable moment de douceur et d’apaisement, où les notes les plus aiguës atteignent notre âme, nos yeux se ferment comme pour mieux apprécier le moment présent. Nous sommes aussi séduits par ces œuvres sombres et troublantes, comme dans la danse macabre de Camille-Saint-Saens, ou hypnotique avec cette Chaconne du baroque Tomaso Vitali, qui nous dévoile un violon qui s’exaspère en cabriole jusqu’à la transe.

Ce concert nous laisse rêveurs, que ce soit un cauchemar ou un doux rêve, nous ne touchons plus le sol, nous sommes envoûtes, nos sens sont en émois devant tant de musicalité.

 

Ce musicien à l’apparence froide et à la concentration inébranlable, nous propose un violon fougueux et généreux. L’artiste ne fait qu’un avec son violon Domenico Montagnana de 1742, qu’il tient d’un mécène privé. A la fois charmeur, sombre ou violent, le violon de Virgil Boutellis-Taft nous chante à merveille les incantations.

 

Pour clore le programme, le jeune compositeur du Murmure des oiseaux, Thomas Enhco, nous fait l’immense honneur de venir accompagner Virgil sur son œuvre au piano. Ce pianiste virtuose et compositeur de musique de jazz et de classique, arrive baskets blanches aux pieds, tout sourire. Ce musicien à la sympathie communicative, nous embarque avec son piano groove aux allures de jazz et d’improvisation, dont la partition répond au violon et orchestre à la musicalité plutôt classique. Le publique est sous le charme de cet artiste qui casse les codes de la musique classique . Nous sommes presque frustrés de ne l’avoir entendu que sur un seul morceau, tant le duo hétéroclite qu’il forme avec Virgil Boutellis-Taft est beau de virtuosité. Avec cette nouvelle génération, la musique classique n’est pas prête de prendre une ride.

 

Découvrez son album Incantations du label Aparté, arrangements Paul Bateman, disponible depuis le 21 février 2020. L’artiste partira en tournée en Angleterre avec le RPO. Il se produira également au Symphony Space à New York, au Steinway Hall de Boston et, pour un intégral de Beethoven (sonates et trios), à la Kursaal de San Sebastian. Vous pouvez suivre l’actualité des artistes sur leurs sites officiels www.virgilboutellistaft.com, www.thomasenhco.com et www.riekotsuchida.com. Pour cette envoûtante découverte, nos remerciements vont à l'agent de presse Andra Focraud et à notre rédactrice Angélique Lili. Cet événement s'est tenu le 2 mars 2020 à la salle Gaveau, 45 rue de la Boétie 75008 Paris. Pour retrouver toute la programmation de la salle, rendez-vous sur leur site internet www.sallegaveau.com - Mars 2020

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Le Week-end du Violoncelle
au Théâtre des Champs-Elysées

Une enchanteresse promenade classique Nous nous réjouissons en ce début d’année 2020 à nous rendre au cœur de Paris dans le célèbre Théâtre des Champs-Elysées. Parmi une grande et belle programmation du Week-end du Violoncelle, nous sommes invités à admirer le concert de Sheku Kanneh-Mason et de sa sœur Isata. Impatients, c’est pour nous une immense joie de pouvoir écouter sur la scène d’un magnifique théâtre parisien, le violoncelliste révélé au monde lors du récent mariage royal du Prince Harry. C’est donc dans cette belle salle que nous prenons place, prêts à nous laisser emporter par les douces notes des deux jeunes artistes classiques.

Les lumières s’éteignent peu à peu pour laisser place à la beauté des airs de Beethoven, Lutoslawski, Barber et Rachmaninov. Nous assistons à une revisite hors du commun et remplie d’émotions. Plus que de la musique classique, nous avons face à nous un réel spectacle vivant tant la passion s’empare des deux artistes. Il y a chez eux une réelle expression musicale et une manière unique d’interpréter ces airs pour leur donner vie une nouvelle fois. Traversés par leur passion nous sommes pris de saisissement et de bouleversement, la musique prend alors une toute autre dimension, c’est comme si nous écoutions une histoire intense et exaltante. L’histoire devient encore plus belle dans le splendide Théâtre des Champs-Elysées.

Edifié en 1913 par un groupe d’artistes, il est marqué par le «scandale» de la création du Sacre du Printemps de Stravinsky et Nijinski, une œuvre qui choqua tout autant par sa musique que par sa chorégraphie. L’aventure artistique du Théâtre des Champs-Élysées est depuis illustrée par la présence des artistes les plus prestigieux de l’histoire de la musique, de l’opéra et de la danse, constamment en recherche de beauté et de vigueur. Nous assistons ici à une interprétation offerte par deux jeunes surdoués de la musique qui nous ne nous laissent pas indifférents. Ils arrivent à nous livrer un concert plein de subtilité et de délicatesse. On ressent un profond désir, une forme de recueillement et une grande élégance dans le phrasé musical qu’ils communiquent. Les variations oscillent entre intimité et intensité dans une atmosphère distinguée et distinctive. Isata et Sheku Kanneh-Mason nous portent avec dynamisme, finesse et pureté.

Dans ce cadre merveilleux, notre imagination navigue au rythme de la musique qui laisse place à notre fantaisie. Touchant et pertinent, les adjectifs sont nombreux pour décrire ce concert plus que prenant porté par l’alchimie entre un frère et sa sœur. A tout juste 20 ans Sheku Kanneh-Mason est un prodige du violoncelle et considéré comme l’un des musiciens les plus brillants de sa génération grâce à son talent et sa présence scénique singulière. Après sa prestation remarquée lors du mariage princier en Angleterre, sa carrière décolle tout comme sa popularité. Originaire de la Sierra Leone, il débute l’apprentissage du violoncelle à l’âge de 6 ans entouré de ses frères et sœurs qui pratiquent tous et toutes un instrument. Son premier disque paraît en France en 2018, et grâce à celui-ci il reçoit la même année le prix BRIT du meilleur artiste masculin. Aujourd’hui, il sillonne les plus grandes scènes comme le Wigmore Hall de Londres, la Tonhalle de Zurich, le Théâtre des Champs Elysées ou encore, le Conservatoire Giuseppe-Verdi de Milan. Passionné par la nécessité de rendre la musique classique accessible à tous, Sheku Kanneh-Mason est l'ambassadeur de nombreuses organisations caritatives dans le domaine de l'éducation musicale.

Sa sœur Isata, pianiste, l’accompagne avec élégance et énergie tout au long du concert. Nous remarquons une proximité musicale évidente qui leur permet de nous livrer une prestation toujours plus unique et vigoureuse. Étudiante en troisième cycle à la Royal Academy of Music de Londres, Isata Kanneh-Mason Kanneh-Mason a entamé une carrière de concertiste soliste couronnée de succès au Royaume-Uni et à l'international. Elle se fait notamment remarquer en 2014 lorsqu’elle atteint la finale de sa catégorie au concours des jeunes musiciens de la BBC et remporte la bourse Walter Todds du musicien le plus prometteur. Chambriste passionnée, elle partage régulièrement la scène avec ses frères et sœurs et fait également ses débuts avec le Royal Philharmonic Orchestra au Royal Albert Hall. Son premier album Romance, sort en juillet 2019 qui remporte un grand succès et devient classé numéro 1 des charts classiques britanniques dès sa sortie.

C’est donc à travers le talent de ces deux prodiges que nous (re)découvrons la magie des airs classiques de grands compositeurs du monde entier. Entre douceur et puissance, ils nous portent majestueusement, tout le long du concert, dans un monde onirique. Nous nous sentons comme dans une bulle, au cœur des Champs-Elysées, éloignés du brouhaha parisien qui s’arrête un instant pour laisser place à la magie et la beauté de la musique. Le silence se fait à la fin du dernier mouvement, la salle est remplie d’émotion et d’admiration. Ce silence est aussitôt suivi d’une standing-ovation de plusieurs minutes, très largement méritée. Isata et Sheku Kanneh-Mason quittent alors la scène, laissant derrière eux une atmosphère féerique et délicieuse. La beauté aura été le maître mot de ce concert, dialogue inoubliable d’un charme sans pareil.

Pour cette fascinante découverte, nos remerciements s’adressent à l’agent de presse Franck Peyrinaud. Un évènement qui s’est tenu le dimanche 23 février 2020 au Théâtre des Champs-Elysées, 15 avenue Montaigne, 75008 Paris. Pour retrouver l’envoûtante programmation du théâtre, rendez-vous sur leur site internet www.theatrechampselysees.fr et les artistes sur leur site officiel www.kannehmasons.com Mars 2020

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The Lights of Opera
à l'Alhambra

Une redécouverte magique des plus grands airs d'opéra Si nous connaissons tous les airs d'opéra grâce aux séries télévisées et aux publicités, il est assez rare que l'opéra s'invite dans notre quotidien pour nous enchanter. C'est pourtant ce que nous offre pour notre plus grand plaisir le spectacle The lights of Opera lors de quatre soirées d'exception dans la grande salle de spectacle parisienne de l'Alhambra.

 

C'est dans cette salle accueillante et chaleureuse que nous nous installons, prêtes et enthousiasmées à l'idée de redécouvrir de grands airs d'opéra qui, sans aucun doute, nous transporteront grâce à leur intensité, tout au long de la soirée. La salle est pleine, la scène est près de nous, nous nous sentons comme dans un cocon, enfermées dans un monde féerique qui s'apprête à nous bercer avec de merveilleux chants lyriques. Les lumières s'éteignent alors pour laisser place tout en simplicité à la musique, que nous attendons avec impatience, sur un premier air de Bellini, Norma dans Casta Diva.

 

Nous sommes dans un cadre atypique. Ancien immeuble de bureaux dans les années 1970, l'Alhambra s'est aujourd'hui transformée en salle de spectacle animée et trépidante. En 2005 lorsque Jean-Claude Auclair, producteur de spectacles, découvre cette salle par hasard, il tombe amoureux de ce lieu au charme désuet et le rachète. La salle est rebaptisée en hommage au célèbre music-hall disparu dans les années 60, pour être dorénavant La Scène de Toutes Les Musiques. Sa large programmation propose une sélection de concerts allant du Hip-Hop au Rock en passant par le Jazz, l’Electro, la Variété et les Musiques du Monde, mais aussi des One Man Show, des Pièces de Théâtre et des Festivals… Lieu magique en plein cœur de Paris , l'Alhambra nous offre un petit coin de paradis pour apprécier et se laisser porter par des musiques et des événements éclectiques et toujours surprenants.

 

Douceur et force à la fois se mêlent tout au long de la représentation pour nous procurer saisissement et émotion. C'est un charmant et élégant spectacle qui s'offre à nous avec la présence de 20 musiciens sur scène, un chef d'orchestre et quatre chanteurs lyriques accompagnés de belles lumières. Chaque chanteur apporte une tonalité différente et des subtilités uniques grâce à leurs personnalités musicales. Nous remarquons particulièrement la justesse et la simplicité du ténor Avi Klemberg qui a débuté sa carrière en Italie à l'Opéra de Rome et qui interprétera de nombreux rôles emblématiques comme la Traviata et la Bohème. Pauline Texier, incroyable soprano légère qui nous a ébloui tout au long de la représentation s'est particulièrement démarquée grâce à sa superbe prestation avec Noriko Urata sur le Duo des fleurs de l'opéra Lakme. Timothée Varon, baryton remarquable, mène aussi avec brio cette ballade lyrique si gracieuse et admirable, qui nous fait naviguer sur un fleuve musical et poétique.

 

Nous félicitons le parti pris créatif de ce concert qui nous fait voyager à travers les styles, les artistes et les pays. Réunir les plus grands airs au sein d'un même spectacle est une idée ingénieuse qui nous permet à tous d'apprécier les musiques envoûtantes de l'opéra. Sous un éclairage original, nous sommes fascinées par le plaisir que nous procurent l'union entre les musiciens et les chanteurs. Seuls ou à plusieurs, tous on réussi à nous exalter et à nous mener vers des chemins différents, comme si l'opéra nous ouvrait ses portes et nous faisait voyager dans le temps, à la découverte de ses plus intimes secrets. Des chanteurs à la fois jeunes et de haut niveau se voient offrir la possibilité d’aborder les plus grands rôles, d’habitude réservés aux stars du lyrique. Décomplexés, ils retrouvent l’essence même de ce qui a fait de ces airs célèbres, des succès éternels : la qualité des

mélodies et de leur expressivité. Leur vigueur et leur enthousiasme amènent un vent de fraîcheur et un souffle de modernité aux musiques qu'ils font revivre.

 

Le défi était de taille, retranscrire en lumière le lyrisme des grands airs et adapter l'opéra dans une salle pour d'autres genres plus contemporains. C'est avec adresse et distinction que le pari est relevé par Jacques Rouveyrollis, créateur de lumière, qui créera un décor par une lumière théâtrale et élégante. Habitué des scènes musicales, Jacques Rouveyrollis signe ses premières créations avec les Jelly Roll après quoi il rejoindra Michel Polnareff. De Joe Dassin à Serge Gainsbourg en passant par Michel Sardou, ce sont plus d'une centaine d'artistes qui ont fait appel à ce fin créateur d'ombre et de lumière.

 

Il donne puissance et vie grâce à ses créations toujours plus impressionnantes et universelles comme à La Concorde à Paris en 1979, Houston, La Défense, La Tour Eiffel avec Jean-Michel Jarre, à Tokyo et bien plus encore. Ses lumières accompagnent avec subtilité le travail brillant de Stanislas Renoult, chef d'orchestre et ancien est professeur de direction d’orchestre à L’École Normale de Musique de Paris. Artiste singulier et amateur de différents genres, il commence à s’intéresser à la musique populaire et crée des ponts avec le classique à partir de 2001. Il fondera d'ailleurs le Paris Pop Orchestra pour être au plus près de cette double casquette: classique et pop. Il poursuivra plus tard une carrière de chanteur solo et ne cessera jamais de diriger les orchestres classiques.

 

C'est donc une vision moderne de l'opéra qui s'offre à nous, que nous savourons avec joie et émerveillement. Après nous avoir fait flotter entre les airs du Barbier de Séville, de La flûte Enchantée et de Carmen, les lumières de la scène s'éteignent et laissent place à une vague d'applaudissements chaleureux et mérités avant que les artistes quittent la scène admirés par un public charmé.

 

Pour cette raffinée et délicate découverte, nous remercions de tout cœur l'attaché de presse Pierre Cordier. Quatre représentations exceptionnelles à venir admirer du 28 au 31 décembre à 21h30 sur la scène de l'Alhambra, 21 Rue Yves Toudic, 75010 Paris - www.alhambra-paris.comDécembre 2019

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Le Lac des Cygnes
par l'Opéra National de Kiev

Un spectacle féerique pour les fêtes Le prestigieux Ballet de l'Opéra National de Kiev fait renaître le magistral Lac des Cygnes au Théâtre des Champs-Elysées du 24 décembre 2019 au 5 janvier 2020. Le célèbre haut lieu du classique à Paris programme l’œuvre de Tchaïkovski exécutée par le Ballet de l’Opéra National de Kiev, en collaboration avec l’orchestre Hexagone.

 

Après la mise en scène du triomphal Casse-Noisette, c'est sous la direction de Viktor Oliynyk, lauréat des concours internationaux les plus prestigieux, que la troupe de l'opéra ukrainien nous offre une prestation grandiose. Connu pour ses ballets à couper le souffle et ses danseurs d'excellence, l'Opéra National de Kiev déploie à travers le monde entier sa renommée et sa grandeur, que nous avons hâte d'aller applaudir sur la splendide scène parisienne du Théâtre des Champs-Elysées.

 

Le monde des arts, du spectacle et de la presse est venu nombreux ce soir de générale, contemplant l’architecture unique de cette belle salle parisienne. Le silence se fait, le ballet commence, sa narration est bien connue. Selon le livret de Begitchev tiré d’un conte allemand, le Prince Siegfried fête sa majorité. Sa mère lui annonce que dès le lendemain, à l’occasion du bal organisé pour son anniversaire, il devra choisir épouse. Marri, il se rend nuitamment en forêt avec son arbalète. Voulant tirer au bord d’un lac sur une nuée de cygnes, il s’arrête, tombant ébahi devant la beauté d’une femme vêtue de plumes. Il s’agit d’Odette, princesse cygne, qui a subi un sort. Ils tombent amoureux. La fin est tragique et nul besoin de la révéler tant Le Lac des Cygnes constitue un – sinon le – classique universel du ballet.

 

Le Ballet de l’Opéra de Kiev offre son premier Lac des Cygnes en Espagne en 1986 et depuis, n’a eu de cesse de se produire à l’étranger avec plus de 500 représentations toujours aussi légendaires. Le ballet est à ce jour le plus joué par la compagnie à l’international, que l'on aura la chance d'admirer pour 16 représentations à l'occasion des fêtes. Toujours autant appréciée, cette œuvre métaphorique, romantique et immortelle traverse les époques et a su marquer les esprits grâce à sa technicité et son univers profondément classique et maîtrisé repris ici par les chorégraphies de Valery Kovtun.

 

Le plus prestigieux et populaire Opéra d'Ukraine compte déjà 24 ballets à son actif constitués de diverses inspirations et consciencieusement travaillés par les plus grands compositeurs et chorégraphes. On y retrouve des inspirations de différents genres et cultures, comme les danses occidentales par exemple, et c'est cela qui crée le caractère unique des spectacles produits par l'Opéra National, composé de 150 talentueux danseurs. Un amour impossible, un prince terrestre et une princesse cygne: ce sont tous ces éléments que Valery Kovtun a décidé d'orchestrer pour rendre un magnifique hommage au vibrant Tchaïkovski. Il ne nous reste plus qu'à attendre avec impatience ce rendez-vous haletant qui promet d'être fabuleux.

 

L’institution ukrainienne revient à l’Alma un an après avoir interprété un autre classique de Tchaïkosvki, Casse-Noisette, sur lequel nous avons publié en ces pages. La chorégraphie, par Valéry Kovtun, reproduit fidèlement celle, originale, de 1877. L’ensemble – la chorégraphie, le décor, l’interprétation musicale – est volontairement classique, mais d’une qualité exceptionnelle, avec la rigueur et l’excellence toutes militaires propres aux formations issues de l’ex-empire soviétique. D’ailleurs, comme nous le rappelle le magnifique dôme de ce monument de l’architecture et de l’ornementation Art déco, les beaux-arts constituent une chose bien trop sérieuse pour les abandonner à l’approximation.

 

La joie et l’émotion artistiques furent grandes lors de cette représentation. Il s’agit d’un spectacle idéal pour la période des fêtes, qui nous ravira tous : spécialistes ou profanes, adultes ou enfants. L’agente de presse spécialisée spectacles Sylvie Desnouveaux a la gentillesse de nous inviter à sa générale le 23 décembre, nous avons goûté à un fin spectacle. Une oeuvre magique qui se tient du 24 décembre 2019 au 5 janvier 2020 au Théâtre des Champs-Elysées, 15 rue Montaigne, 75008 Paris - www.theatrechampselysees.fr, pour visionner les extraits du spectacle rendez-vous sur Théâtre Champs-Elysées Le Lac des Cygnes – Décembre 2019

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Le Presbytère
par le Béjart Ballet Lausanne

Un ballet mythique La saison est déjà bien entamée et déjà nos regards se tournent vers les spectacles parisiens de ce Noël. Parmi les propositions foisonnantes de réjouissances en tout genre, l’un se distingue, à savoir les représentations annoncées - et attendues - du célèbre ballet Le Presbytère, produit sur la scène du Palais des Sports de Paris, pour quatre dates exceptionnelles, les 31 octobre, 1, 2 et 3 novembre. Nous avons hâte de découvrir un tel spectacle, qui laissera, nous en sommes sur un vif souvenir riche d’émotions.


L’incontournable Béjart Ballet Lausanne de feu Maurice Béjart nous livre ici une performance atypique, car ce ballet fait figure d’Ovni dans les répertoires très classiques des compagnies internationales de danse, il est depuis devenu un classique. Présenté en première à Lausanne en 1996, il est crée en France en 1997 au Palais National de Chaillot. 5 ans après sa dernière représentation en France, il est livré à nouveau à l’admiration du public parisien. Dès la scène d'ouverture, l'émotion et l'impression de grandeur prennent le spectateur par les tripes en observant tous les danseurs allongés au sol, cachés sous de grands draps blancs, se redresser peu à peu sur la musique de Queen « It's a beautiful day ». C'est alors une annonce majestueuse et pleine de volupté que nous fait la troupe à travers une chanson vigoureuse et puissante les accompagnant parfaitement comme une longue balade musicale douce et forte à la fois.

 

Il n'est pas simple de définir ce ballet tant il est éclectique et électrique. C'est un spectacle fougueux et énergique, radicalement épuré, donnant toute sa force au langage des corps, des sons et des couleurs. Sous les chorégraphies somptueuses et rythmées du maître Béjart et des lumières de Clément Cayrol, c’est un festin visuel et sonore qui nous est partagé, associant des titres de Queen, de Mozart et des costumes graphiques de Versace. L'alliance entre classique et rock crée une ambiance singulière et offre au ballet une double dimension. Il n'est pas commun d'observer un mélange de genre si puissant. On pourrait croire que tout les oppose : l'un au service de l'élégance et de la douceur et l'autre comme symbole de rébellion et de vigueur, et pourtant ce splendide ballet nous livre un mariage de styles digne d'être célébré. Il n'est pas question ici de vanter l'un au détriment de l'autre, bien au contraire le chorégraphe offre au spectateur de participer au rendez-vous entre les genres. Éclos alors sous nos yeux ébahis une multitude de chorégraphies abordant différents thèmes revisités par la danse de Béjart. En effet, plus qu'un spectacle de danse, ce ballet et aussi porteur d'un message : il questionne et dénonce l'amour, le désir et les relations entre chacun à l'époque du sida.

 

Tout est amené avec brio et subtilité grâce à la finesse de la chorégraphie et au choix des chansons abordant tantôt des aspects plutôt dramatique, joyeux, festif ou même romantique. Gil Roman marie adroitement une structure classique à une autre contemporaine s'enchaînant sur une mécanique juste et tumultueuse à la fois. Il a su poursuivre l’excellence Béjartienne, il intègre le ballet en 1979 et on remarque ses propres chorégraphies distinctives, telles celles de L’Habit ne fait pas le Moine (1995). On aime et on ne peut qu'admirer la manière dont chacun sur scène est animé par le besoin de danser, permettant alors de nous livrer un show épatant certes, une technique maîtrisée, sans aucun doute, mais surtout de l'émotion. Tout cela est traduit par la passion que l'on peut percevoir ancrée à leur chair et que l'on devine essentielle aux danseurs comme aux spectateurs.

 

Les 40 danseurs dirigés par Gil Roman, lequel succède à Béjart depuis 2007, donnent toute leur énergie pour célébrer un tel moment de danse contemporaine, un opus vivant et brut conçu comme un hommage au danseur argentin Jorge Donn, célèbre étoile de la troupe Béjart. L'hommage est vrai et puissant. Nous voyons lentement descendre un écran sur la scène dans les dernières minutes du spectacle tandis que la lumière s'éteint et que les danseurs se rangent sur les côtés de la scène pour laisser place au visionnage d'une chorégraphie de Jorge Donn sur la musique I want to break free. La simplicité de cet hommage en fait une révérence touchante car le chorégraphe choisit de nous laisser admirer l'ancien danseur de la troupe de Béjart dans toute sa splendeur, aucun artefact, aucun élément superflu, la mémoire du danseur est purement honorée.

 

C'est donc un spectacle aussi flamboyant visuellement que techniquement que nous avons l'honneur et le plaisir d'applaudir pendant plus de quatre minutes au sein d'une standing ovation très largement méritée. Il est maintenant sûr que l'on se souviendra avec bonheur de ce moment d'élégance et de sincérité qui nous a véritablement touché et impressionné.

 

Certainement l’un des ballets les plus remarqués de la rentrée, à découvrir dans la grande salle du Dôme de Paris. Nos vifs remerciements s’adressent à l’agent de presse spécialisé Xavier ChezLePrêtre et à notre rédactrice Zoé Clergue. Photographies Grégory Batardon et Ilia Chkolnik. Un évènement qui s’est tenu ce 1er novembre 2019 au Dôme de Paris, 34 Boulevard Victor, 75015 Paris - www.palaisdessports.com et www.bejart.ch - Novembre 2019

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Ercole Amante
à l'Opéra-Comique

Un opéra fantastique revisité Il est parfois de ces instants privilégiés et exceptionnels: comme être invités à la pré-générale d’un opéra, c’est à dire à l’ultime répétition d’une production, sans public. Vivre ce moment inédit à l’Opéra Comique de Paris, avoir toute la Salle Favart pour soi, rien de plus grandiose dans la capitale, c’est presque magique.

 

C’est ainsi qu’en ce 1er novembre, nous pénétrons tels des enfants devant un sapin de Noël par la porte des artistes de cette grande salle de spectacles lyriques parisiens, afin d’assister à la dernière production de l’institution, Ercole Amante, signée de la direction musicale experte de Raphaël Pichon et sous la co-réalisation audacieuse de Valérie Lesort et de Christian Hecq, déjà remarqués avec leur Domino Noir, un sublime opéra modernisé présenté en ces murs et sur lequel nous avions écrit en ces mêmes lignes. Sous la direction d’Olivier Mantei depuis juin 2015, l’Opéra Comique connaît une riche programmation renouvelée et d’avant-garde et le démontre ici à nouveau.

 

Une grande production de l’Opéra Comique nous est présentée ce soir, en coproduction avec le Château de Versailles et l’Opéra National de Bordeaux, elle nous est donnée à voir en 3h30 avec un entracte. Un feu d’artifice d’émotions lyriques étonnantes, portées par le Choeur et Orchestre Ensemble Pygmalion et un Nahuel di Perro remarquable en Ercole.

 

Nous prenons place dans l’immense salle baroque, accompagné d’un petit comité seulement, des happy few qui vont pouvoir se réjouir en primeur de cet opéra composé d’un prologue et de 5 actes, créé en 1662 aux Tuileries, sur l’instigation de Mazarin pour les noces de Louis XIV, roi qui sera aussi sous les bonnes auspices de la création de l’Opéra Comique lui-même, la boucle est bouclée ce soir.

 

Un opéra de l’italien Francesco Cavalli, chanté en italien et sous-titré en français et en anglais, qu’il nous est donné à voir de façon exclusive et privilégiée, nous voilà déambulant sous les ors de la salle magnifique, toute revêtue de rouge. Le moment est délicieux, c’est une première pour nous.

 

Une œuvre rare, qui inspirera Lully, montée ici de façon flamboyante et brillante, une œuvre servie par des décors atypiques de Laurent Peduzzi et des costumes (et machines) de Vanessa Sannino. Préalablement à chaque représentation, le public pourra aussi recevoir une présentation conférencée de l’oeuvre ou s’exercer à chanter comme Hercules. On aime la fonction sociale de l’Opéra Comique, que nous trouvons plus démocratique que l’Opéra National de Paris.

 

L’enjeu pour les metteurs en scène résidait ici dans la difficulté de faire voir et comprendre au public de 2019 un opéra créé dans une séquence historique précise – les noces de Louis XIV avec L’Infante d’Espagne, scellant tout à la fois le triomphe de la France, première puissance de l’époque, et l’union des deux monarchies – et convoquant des références culturelles désormais abstruses (le livret est inspiré tout à fois des Trachiniennes de Sophocle et des Métamorphoses D’Ovide, plus guère lus).

 

Valérie Lesort et Christian Hecq s’en sortent magistralement, conservant les codes de la tragédie antique, dont la triple unité, notamment de lieu (un seul décor), tout en adaptant Hercule Amoureux au corpus symbolique contemporain. Il s’ensuit une mise en scène formidable, tout à la fois baroque et surréaliste, volontairement kitsch et décalée, qui nous fait penser volontiers à un Alice au Pays des Merveilles version 2.0. Colonnes grecques et angelots côtoient zombies extraits de la nuit des morts vivants et monstres semblables à ceux des séries japonaises. Il y a en outre une abolition très bien sentie entre le décor et les personnages, les éléments de celui-là étant parfois littéralement habités par ceux-ci.

 

La musique est quant à elle sublime et magistralement interprétée. Ercole Amante est une très belle oeuvre, au sens le plus premier et le plus strict des mots, qui ravira donc aussi l’oreille des profanes. Il en est alors parfois des opéras oubliés comme des légumes éponymes: peuplés de saveurs peu communes et qui nous ravissent.

 

Pour cette vibrante découverte lyrique, nos remerciements s’adressent à Alice Bloch, attachée de presse de l’Opéra Comique ainsi qu’à notre rédacteur Maître Frédéric Forgues, Avocat au Barreau de Paris. Photographies de Stefan Brion. L’Opéra Comique, une grande institution du lyrique à Paris, établi avec brio depuis 1714 à Place Boieldieu 75002 Paris - www.opera-comique.com - Novembre 2019

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L’Orchestre des Champs-Élysées
au TAP de Poitiers

Un grand concert classique en Province Nous nous aventurons volontiers en Province dès que cela est possible afin de sortir du parisiano-centrisme de la création classique française. Pour notre grande première au TAP de Poitiers, nous sommes servis d’un programme éclectique: un récital dédié à Beethoven, en présence de l’Orchestre des Champs-Élysées (en résidence en Nouvelle Aquitaine et associé au TAP, fêtant cette saison sa 25ème année d’existence), accompagné avec brio de l’un des pianistes russes authentiques les plus en vue: Yury Martynov, fin spécialiste de Beethoven et des claviers d’époque, ici en l’occurrence du pianoforte. Une jolie promesse de réjouissances nous est faite.

 

Qu’il est agréable de se rendre au TAP ce soir là, sillonnant ces rues piétonnes illuminées de Poitiers, dans un centre historique magnifiquement rénové et rendu aux piétons. C’est sur les murs d’un ancien bâtiment que s’élance désormais cette imposante structure innovante que Le Corbusier n’aurait pas reniée. Une œuvre détonante signée de l’architecte portugais João Luís Carrilho da Graça, qui joue d’une habile opposition avec l’architecture millénaire du centre ville, fière contribution du 21ème siècle au plateau historique de Poitiers.

 

Nous découvrons tels des enfants devant un cadeau de Noël cette architecture cubique et résolument avant-guardiste qui contraste volontairement avec le paysage de cette ville historique aux 100 clochers. C’est en ces murs illuminés que l’ancien et le moderne vont se rejoindre, pour la création d’émotions inédites, dans le Grand Auditorium de ce nouveau lieu culturel du Grand Ouest de la France.

 

Nous entrons dans cette spacieuse salle résolument chaleureuse, toute de bois clair revêtue, avec cette proximité avec les auditeurs, marquée par la circularité du public qui peut ainsi avoir un 360 degrés sur la scène, configuration de plus en plus populaire dans les salles de concert en France, à l’instar de la Philharmonie de Paris sur laquelle nous avons écrit en ces lignes. Les poitevins sont venus nombreux ce soir là, au point que la presse a même du mal à s’y placer.

 

Au programme, la célèbre Symphonie N°1 en ut majeur qui fera l’introduction, suivie du Concerto pour piano et orchestre N°1. Deux primes œuvres du jeune Beethoven s’installant à Vienne qui seront jouées ici avec brio par l’OCE, sous l’habile direction de son premier violon, Alessandro Moccia, en absence de chef d’orchestre donc.

 

On aime cette fonction fondatrice populaire du Théâtre-Auditorium de Poitiers: 5 minutes avant le concert, une annonce informe l’assistance que la salle est dénumérotée, nous permettant de nous replacer librement. Nous voilà ainsi au premier rang, en premières loges d’un magnifique spectacle. Saluons le dynamisme culturel et musical de la Nouvelle-Aquitaine, qui démontre que spectacle et créativité rythment aussi avec la Province. Nous n’avons que trop parlé des spectacles parisiens, nous avons plaisir à couvrir ce concert à Poitiers. Les grands pans de bois des accès se referment afin de préserver l’acoustique des lieux, l’évènement peut prendre place dans un doux cocon de bois tendre.

 

La virtuosité sarde préside au jeu du premier violon Alessandro Moccia, qui d’un doigté remarquable, mène le bal. Fougue et tempétuosité marquent ce premier mouvement, justement donné en ouverture magistrale. Cet Orchestre des Champs-Elysées est spontanément attachant: il joue merveilleusement bien, d’autant plus qu’il est rendu accessible par cette proximité au public et servi par une acoustique irréprochable.

 

On notera la puissance et la finesse du jeu de tous les violons qui jouent comme un seul corps. Pas de piano sur cette Symphonie, la rendant toute aussi légère qu’enchanteresse. Nous sommes résolument dans un thème héroïque si cher à Beethoven. Le 2ème mouvement sera plus printanier et romantique, le 3ème est du domaine du fantastique. On remarquera le jeu puissant de la musicienne percussionniste de cette formation. Le premier violon italien a plaisir à jouer, cela transparaît dans tout son être sur scène et il nous communique sa joie non dissimulée.

 

A l’entracte, apparaît sur scène le pianoforte, revêtu d’acajou. Il sera l’instrument de la réussite du pianiste russe pour ce Concerto pour piano et orchestre N°1. Apparaît le grand Yuri, vêtu d’une chemise grise de gala slave. Le 1er mouvement est lancé et le son du pianoforte se marie à merveille avec le reste de la formation. Tout en finesse et en grâce, le maestro russe nous livre une démonstration de talent inné. Sans micro dans la salle, nous apprécions un son premier pur et vif qui donne toute son expression à la partition du maître Beethoven, laquelle laisse une belle place au soliste. Cet opus marque déjà les mouvements beethovéniens si reconnaissables, une œuvre précoce qui dénote un style unique. Nous voici aux premières loges de l’excellence et de la grâce, attentifs à chacun des mouvements du pianiste émérite.

 

Le second mouvement est des plus romantiques, avec ce jeu dextre du pianiste russe qui élève les coeurs vers des cieux élégiaques. Le sarde virtuose lui répond et rythme l’orchestre des mouvements de son archet, avec bienveillance et mesure. Le troisième mouvement est énergique et grandiose, il fait feu de tous les instruments. Quelle orchestration magnifique, un jeu précis et coordonné nous est livré, franc et sincère. Sous les applaudissements, le maître russe exécute un solo de Beethoven remarquable sur pianoforte. L’essence de cet art nous est livré à nu. Comme clin d’oeil à sa culture, Yuri nous donne également le jeu d’un air russe célèbre pour achever cette belle soirée en beauté.

 

Nous aurons grand plaisir à retrouver l’Orchestre des Champs Elysées en ces mêmes lieux le 10 novembre pour un concert placé sous la direction de Philippe Herreweghe, dédié à Brahms et Bruckner. Notons que le TAP accueillera dans sa programmation classique le Quator Arod le 14 novembre. Pour cette belle découverte culturelle, nos remerciements s’adressent à Ingrid Gouband du TAP. Le Théâtre-Auditorium de Poitiers, une institution culturelle dynamique et Scène Nationale établie depuis 2008 au 6, rue de la Marne 86000 Poitiers - www.orchestredeschampselysees.com et www.tap-poitiers.com - Octobre 2019

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Le Festival Les Coréades
par le CoRéam

Du beau classique en Province Qu’il est agréable de sortir de Paris et de vivre d’intéressants moments de classique de qualité en Province. En Nouvelle Aquitaine, le dynamique CoRéam (subtil jeu de mots conçu avec corps et âme) nous fait cette année encore la démonstration de la passion fraîche et vivifiante qui anime ce groupe de fiers amateurs aux talents remarquables et nous réjouit de la 25ème édition de leur Festival des Coréades, réchauffant de hauts lieux architecturaux du Poitou-Charentes de sonorités et d’émotions classiques.

 

Saluons cette troupe de joyeux troubadours qui pendant un mois cet automne, ont sillonné les routes de Nouvelle Aquitaine, de Poitiers à Angoulème, La Rochelle ou Mérignac, produisant cette année nombre de concerts intimistes notamment sur l’axe La Rochelle, Niort, Poitiers. Rare est démontrée autant d’énergie itinérante au service d’une mission: donner à tous l’accès à la culture de la musique classique.

 

Une telle initiative riche de créativité est rendue possible grâce à l’action continue de son émérite directeur artistique et chef d’orchestre Jean-Yves Gaudin (1er Prix de Direction d’orchestre ENM Paris 1978). Flamboyant et généreux, il mène cette entreprise désintéressée d’une main experte, assisté de fidèles collaborateurs associatifs. En association avec la Philharmonie Nationale de Roussé de Bulgarie dont il est proche, ce festival itinérant dynamise la présence culturelle du classique dans l’Ouest de la France, avec toujours cet objectif: offrir des sorties classiques familiales accessibles à tous. Notons sur ce point la gratuité aux moins de 16 ans.

 

Crée en 1982, cette association CoRéaM (pour Collectif Régional d’Activité Musicale) force le respect: 250 membres, plus de 100 concerts à son actif, 2 festivals annuels (les Coréades et le Bach à Pâques – qui n’est pas programmé cette année, espérons qu’il le sera l’année suivante -). On se souviendra de l’opus sur Verdi en 2012 qui a rassemblé 5500 spectateurs. En sus de son activité de formation, cette organisation conserve une riche bibliothèque de textes pour les chorales de France.

 

Au programme des réjouissances de cet automne, un foisonnement d’amabilités symphoniques: Dvorak, Massenet, Schumann, Liszt et bien sûr Brahms lequel donne le fil directeur de ce festival haut en couleurs et en passions: Voyages avec Brahms, lequel, avec ses amis Robert et Clara Schumann, étaient de fins voyageurs européens. Deux ensembles vocaux remarquables accompagnent cette odyssée charanto-poitevine: Bois d’Amour sous la direction de Jacques Richard et Polymnie sous la direction de Fabrice Maurin, accompagnée au piano de Massanori Kobiki.

 

En ce 15 octobre, nous sommes conviés à Poitiers, ville charmante et au coeur historique rénové qui est le siège d’édifices remarquables. C’est à deux pas de l’imposante Cathédrale Saint-Pierre de Poitiers que l’assistance afflue, à l’Église Sainte-Radegonde, qui sera l’écrin privilégié des festivités du soir. Ein Deutsche Requiem de Brahms est donné, tout un programme, en présence des solistes français Fabienne Conrad soprano et Matthieu Lécroart, baryton. Ils seront secondés par une grande chorale en formation conjointe: l’Ensemble Choral Régional du CoRéaM, l’Ensemble Chorus 17 et les Accords Libres de Mérignac.

 

En ce doux soir d’octobre, qu’il est agréable de déambuler de nuit dans le centre historique de Poitiers et de contempler ces vieilles pierres historiques subtilement illuminées. Nous pénétrons dans l’Église Sainte-Radegonde, célèbre figure de Poitiers, fondatrice du baptistère Saint-Jean de Poitiers situé à quelques pas. Nous saluons le porche du 11ème siècle et la nef du 13ème siècle, sous nos pas, une crypte du 6ème siècle. Un lieu propice au répertoire qui est donné ce soir: Ein Deutsches Requiem, qui n’en est pas un réellement mais qui est l’interprétation libre du protestant Brahms et qui sera chanté en allemand, suivant un air proche de celui du français Fauré. Un opus écrit en 7 parties, dont la 5ème est ajoutée après la disparition de sa mère, qui sera chantée par la soliste soprano. L’assistance est venue nombreuse ce soir là.

 

De retour de ce même concert présenté à Angoulème quelques jours avant, nous découvrons une chorale au grand complet et tout sourire, accompagnée d’un orchestre philharmonique expert, celui de Roussé, qui honore le festival de sa 23ème participation continue. Nous prenons place au premier rang, gentil privilège pour la presse et nous pouvons admirer l’orgue rutilant et sa charpente métallique restaurée, certainement l’un des plus beaux d’Aquitaine. Nous sommes impressionnés de voir un orchestre et chorales aussi complets, cordes, cuivres, harpe, rien ne manque. La disposition de l’église accentue cet effet intimiste, nous sommes à un petit mètre des artistes.

 

Le premier mouvement est chaud et grave, on remarque le chef d’orchestre grand patriarche qui dirige ce grand ensemble d’une main de maître. L’acoustique de l’église donne un résultat confortable. Le choeur fait la démonstration de sa vitalité, même s’il est composé principalement de femmes à l’âge émérite. L’ouverture est magistrale, sans les violons dans cette introduction pour plus de tendresse partagée.

 

Le deuxième mouvement marque une envolée lyrique, nous songeons volontiers à un Christmas Carol, annonçant les festivités de Noël qui sont là dans un mois. Le troisième mouvement salue l’entrée du baryton lequel révèle une puissance vocale impressionnante, il vit son texte et le chante avec clarté, nous sommes en présence de l’un des grands barytons français assurément, donnant la mesure de l’un des nos mouvements préférés de ce Requiem. Le 4ème mouvement sera similaire au deuxième, la première violoniste du Roussé seconde le chef d’orchestre avec application et tous les musiciens sont d’un très bon niveau de précision et d’expression.

 

Le 5ème mouvement laisse place à la démonstration de Fabienne Conrad qui manie sa voix avec puissance et douceur. Étincelante de bijoux et en grande robe de bal, elle nous fait penser à une Callas qui se révèle, le charme opère sur un public conquis. Fabienne Conrad a illuminé la soirée de sa présence et de son talent confirmé. Le 6ème mouvement sera puissant et fantastique, l’orchestre bulgare donnant toute son énergie, pour une finale grandiose.

 

Un concert servi en apothéose qui achève ce riche festival, la dernière représentation étant donnée dans la Cathédrale Saint-André de Bordeaux ce 17 octobre. On pourra retrouver la remarquable soprano Fabienne Conrad en France le 10 novembre 2019 pour les Airs d'Opéras à la Tour Eiffel et le 31 décembre pour le concert du réveillon à la Tour Eiffel, puis en 2020, jouant Leonora dans le Trouvère, Marguerita & Elena dans Mefistofele et autres actualités à suivre sur son site www.fabienneconrad.com.

 

L’année prochaine, le festival des Coréades sera sous l’augure de Puccini (Messa di Gloria) et d’Edard Grieg (Olav Trygvason), nous aurons plaisir à revenir, notamment pour admirer ces beaux édifices dans lesquels les concerts du CoRéaM sont donnés. Pour cette découverte artistique très plaisante, nos remerciements s’adressent à Yasmine Gontard du CoRéam. Le CoRéaM, une formation vocale et musicale régionale de qualité, établie avec brio au 12 rue Joseph Cugnot 79000 Niort - www.coream.org - Octobre 2019

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L'Opéra en plein air - Tosca

Un opéra dépaysant et magique Chaque été, nous ne pouvons manquer notre petit rituel qui marque l’ouverture des réjouissances estivales: l’Opéra en Plein Air, dont les premières dates ont lieu traditionnellement au majestueux Château de Sceaux, dans le parc de 180 hectares commandité par Colbert à Le Nôtre, Perrault et Le Brun. Cette année, au détriment d’une météo capricieuse, nous devons renoncer à être présents aux premières des 14 et 15 juin, c’est aussi cela l’aléa du plein air.

 

Après une date dans le sud à la Cité de Carcassonne (un haut lieu historique que nous aimons visiter chaque été), revoici la fine équipe de cet opéra ambulant unique en France de retour au Château de Saint-Germain-en-Laye, après une escale préalable au Château de Vincennes.

 

En ce samedi 6 juillet, nous nous retrouvons face à la large esplanade qui surplombe Paris, à côté des jardins dessinés par Le Nôtre, là où se dresse fièrement le Château-Vieux de Saint-Germain, dont la première construction remonte à 1124. L’histoire nous contemple depuis ses hautes pierres, le coucher de soleil sur la scène face au sud l’anime d’une lumière particulièrement romantique.

 

Quoi de plus opportun que de venir voir cet opéra Tosca ici à Saint-Germain, là où se situa le fameux duel du Coup de Jarnac, comme un écho lointain à l’intrigue, l’honneur et la passion de cette narration dramatique et romancée de l’oeuvre opératique de Giacomo Puccini.

 

Le foule est venue nombreuse ce soir, comme à chaque édition, cet opéra au format inédit en France rencontre un succès inaltéré depuis sa création en 2001. En tête d’affiche, Agnès Jaoui, la célèbre metteuse en scène et comédienne, attire certainement un large public. Elle signe ici sa première mise en scène d’opéra, elle qui est aussi chanteuse lyrique, un volet méconnu de son riche talent d’artiste française.

 

Nous voilà partis pour 2h30 de spectacle dont 20 minutes d’entracte. Un festival interrompu d’arts lyriques d’excellence, marquant de sa haute tenue un niveau digne des grandes productions internationales. Dans ce mélodrame riche et complexe, à rebondissements inattendus, écrit pour Sarah Bernhardt, on y découvre les amours et les jalousies de Tosca, célèbre cantatrice, de son amant peintre et une terrible police qui va semer la discorde dans ces idylles chancelantes.

 

Quel brio cet opéra Tosca, créé le 14 janvier 1900 à Rome. 3 actes tirés de la pièce de Victorien Sardou, qui fût aussitôt un échec, avant que la Scala de Milan le reprenne. En 1903, l’Opéra Comique le présente en France et le succès naît, avant de devenir un opéra mythique.

 

L’action se déroule en 1800 sous la république romaine des français. Floria Tosca maîtresse du peintre et cantatrice jalouse est au coeur d’un mélodrame devenu célèbre. Maria Callas fût l’une des grandes interprètes de ce magnifique rôle de 1942 à 1965, il sera aussi son dernier rôle sur scène. Cet opéra évoque le film Tosca de Jean Renoir de 1941. Il apparaît dans le James Bond Quantum of Solace dans son 1er acte pour les cinéphiles contemporains.

 

Le travail d’Agnès Jaoui est remarquable. On note ces écrans géants qui permettent de changer de décor avec simplicité, une innovation plaisante. La scénariste césarisée a travaillé avec rigueur et générosité pour cette mise en scène, en essayant de casser les codes pour livrer un opéra plus vrai et sincère. Elle qui a hésité entre le lyrique et la comédie est aussi membre de l’ensemble vocal Canto Allègre qui a publié quatre disques, le premier étant Canta en 2000.

 

Elle fût épaulé par Yannis Pouspourikas à la direction musicale. Du Conservatoire de Genève, ce chef associé à l’Opéra d’Essen et de Zurich, ancien chef assistant à l’Opéra de Paris, élève de Sir Simon Rattle et chef invité à l’Opéra de Sydney a dirigé les Noces de Figaro en 2017 pour l’Opéra en Plein Air. Il renouvelle cette saison son attachement pour une telle aventure humaine et lyrique hors normes.

 

Le grandiose succède à l’émotion dans ce chef d’oeuve porté par une troupe talentueuse, bien coordonnée et jouant en harmonie parfaite. Aucun temps mort ici, l’oeuvre fidèle à son créateur est portée à un niveau remarquable par l’énergie qui s’empare de la scène et qui communique à son public une belle émotion sensorielle. Le cadre majestueux et le plein air ajoutent à cette féerie théâtralisée, le son pur s’égaye dans la nuit. Un spectacle rêvé et charmant.

 

La scénographie de Philippe Miesch est une épure qui laisse place à l’action et à la narration. La maîtrise des Hauts de Seine, dirigée par Gaël Darchen ajoute une fraîcheur à l’émotion sonore qui anime cet opéra. Les costumes de Pierre-Jean Laroque répondent au classicisme intemporel de cette grande pièce opératique.

 

Nous distinguerons la soprano Ewa Vesin (en alternance avec Deniz Yetim) dans le rôle de Tosca, tout simplement merveilleuse. Elle fût remarquée dans ses rôles dans Halka et de Vitellia dans Clémence et Titus. Le ténor Paolo Scariano émerveille dans le rôle de Cavaradossi, donnant la réplique à Tosca. Enfin, le baryton niçois Jean-Luc Ballestra impressionne dans son rôle du baron Scarpia, chef de la police.

 

Une distinction sera donnée au premier violon de l’orchestre Anne Gravoin, célèbre violoniste de Montauban issue d’une père violoniste de l’Orchestre Philharmonique de Radio France. Elle fût remarquée par ses collaborations innovantes avec Laurent Voulzy, Nolwenn Leroy, Alain Souchon ou encore Véronique Sanson.

 

On aime dans cet Opéra en Plein Air leur ouverture au grand public, avec des tarifs doux pour un opéra. 2700 personnes sont venues ce soir admirer ce show lyrique gigantesque, devant la belle façade des Loges. L’année dernière avec Carmen de Bizet, ce sont 40 000 spectateurs qui sur 15 représentations ont pu admirer des performance scéniques brillantes sur plus de 7 sites historiques, notre préféré restera certainement celui du Château de Bataille. Nous retrouverons l’opéra-troubadour les 4, 5, 6 et 7 septembre à l’Hôtel National des Invalides.

 

On apprécie aussi la version pour enfants de cet opéra la Pucola Tosca, une innovation de cette saison. Pour cette belle découverte lyrique, nos remerciements s’adressent à l’agent de presse émérite Pierre Cordier et à Caroline Rocher de l’Opéra en Plein Air. L’Opéra en Plein Air, une production lyrique unique en France, établie avec passion au 5 Rue Beaujon 75008 Paris. Photographies: Teresa Suarez - www.operaenpleinair.com - Juillet 2019

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Le Lac des Cygnes
par l'Universal Ballet

Un célèbre ballet consacré par l’Asie Le mois de juin est la période rêvée pour bénéficier des derniers grands spectacles parisiens avant la grande pause de l’été. C’est le cas avec le passage à Paris d’une grande compagnie de ballet venue d’Asie où nous sommes conviés. Nous nous y rendons très volontiers, curieux d’assister à une interprétation originale de cette œuvre grandiose, tirée d’une influence asiatique qui donnera certainement à ces tableaux archi-connus un twist inédit.

 

Nous avons hâte de découvrir une interprétation moderne et renouvelée, qui fera penser certainement à un beau tableau des célèbres ballets russes. Un événement de danse original qui fût à découvrir Porte Maillot, le célèbre ballet Le Lac des Cygnes fût à nouveau présent dans la salle magistrale du Palais des Congrès de Paris du 21 au 23 juin 2019 pour quatre représentations exceptionnelles de l’Universal Ballet qui compte parmi les plus prestigieuses compagnies de ballet classique au monde.

 

Cette compagnie très créative, basée à Séoul, remarquée pour son interprétation de Giselle notamment, est composée de 70 danseurs émérites. L’Universal Ballet n’a eu de cesse de gagner en reconnaissance et en réputation depuis sa création en 1984. D’après le New-York Times, l’Universal Ballet est l’une des compagnies de ballet les plus réputées d’Asie. Elle est dirigée par Julia H. Moon, fille du fondateur, qui y fût danseuse étoile depuis 2001.

 

L’Universal Ballet porte bien son nom puisqu’il rassemble des danseurs et danseuses de plus de 12 pays. Son ascension a été consacrée en particulier par le soutien de grands danseurs telle la fondatrice et directrice artistique Adrienne Dellas et son successeur Vinagradov, ancien directeur artistique de l’illustre ballet du Kirov de Saint-Petersbourg. L’Universal s’est notamment illustré sur les scènes internationales avec Don Quichotte et Giselle et dans un registre contemporain avec In The Middle et Somewhat Elevated de Willliam Forsythe.

 

Julia Moon, née aux Etats-Unis, a été formée par le Royal Ballet School de Londres et par l’école Princesse Grace de Monaco. En 1984, elle devient fondatrice de l’Universal Ballet puis directrice générale en 1996. Elle dirige également le Kirov Academy Ballet à Washington DC. Après une carrière internationale, cette célèbre danseuse sud-coréenne dansera la plupart des rôles principaux du répertoire de la compagnie. En 1989, elle est la première danseuse asiatique invitée à se produire au fameux Ballet Kirov de Saint-Pétersbourg où elle incarnera le rôle principal de Giselle, elle dansera également dans Don Quichotte en 1992 et dans Le Lac des Cygnes en 1995. Elle est nommée directrice générale de l’Universal Ballet en 1996.

 

Entre 1992 et 1998, Oleg Vinogradov collabore régulièrement avec la compagnie de Séoul en y apportant son héritage de la tradition classique du ballet russe. L’Universal Ballet devient ainsi leader dans le développement de la danse classique en Corée du Sud ainsi que dans toute l’Asie. Oleg Vinogradov est directeur artistique de l’Universal Ballet de 1998 à 2007 et reste encore directeur artistique d’honneur de la compagnie. Brian Yoo, qui a rejoint la compagnie en 1999 en tant que maître de ballet, devient en 2009 le directeur artistique.

 

Chorégraphié par Oleg Vinogradov et par Brian Yoo, ce Lac des Cygnes présenté à Paris reste le ballet romantique par excellence, d’après l’oeuvre originale de Marius Petipa et Lev Ivanov sur la musique de Piotr Ilitch Tchaïkovski. Cette nouvelle version asiatique explore en deux actes les méandres de l’amour éternel en conjuguant l’union de l’harmonie et la grâce de la pensée culturelle asiatique, avec la force et la beauté de la danse classique occidentale. Un mix inédit et poétique que nous avons pu découvrir avec ravissement. Brian Yoo est d’origine chinoise, il rejoint l’Universal en 1999 et en devient maître de ballet, il rejoint la direction artistique en 2000. Il a chorégraphié les ballets coréens The Love of Chunhyang et Paganini Rhapsody.

 

Le formidable ballet Le Lac des Cygnes fut originellement créé à Moscou en 1877, sur une partition commandée à Tchaïkovski, la première de ses trois plus célèbres créations. Cette première production dirigée par Julius Reisinger fut un échec. Il fallut attendre la mise en scène de Marius Petipa et Lev Ivanov créée au Théâtre Mariinsky, à Saint-Pétersbourg, en 1895, pour que Le Lac des Cygnes reçoive son succès mérité. Au fil des ans, des changements furent apportés au ballet par l’équipe du Théâtre Mariinsky. Les plus notables furent ceux de Constantin Sergueïev en 1950. La version dansée par l’Universal Ballet comprend également des révisions apportées par Oleg Vinogradov qui succéda à Sergueïev en tant que directeur de la compagnie de ballet au Mariinsky.

 

Très annoncé, nous avions hâte de découvrir la toute première de l’Universal Ballet à Paris, l’une des rares manifestations parisiennes de l’un des plus prestigieux ballets d’Asie et certainement le premier de Corée. Quatre représentations exceptionnelles vont ravir le public parisien venu nombreux, fin spécialiste des ballets vu le nombre de représentations de niveau à Paris produites à Paris.

 

Nous sommes charmés de voir pour la première fois l’expression fine de la maîtrise asiatique de cet art dansé, telles des peintures humaines où l’harmonie et la précision célèbrent la tradition ancestrale de l’Asie pour la danse. Il est même étonnant que l’Asie n’ait pas plus de représentativité en ce domaine, l’Universal Ballet comble cette lacune.

 

Sous une chorégraphie de l’émérite Oleg Vinogrador, nous découvrons les tableaux impressionnants dressés par les danseurs et danseuses énergiques du ballet Coréen. Précision, contrôle et grâce marquent ces tableaux chatoyants ou graves qui sied bien à l’oeuvre mondialement connue de Piotr Tchaikovski, sinon l’un des plus connues du répertoire classique russe. Les costumes seront dans la tradition classique, le décor résolument baroque, un tout harmonieux et cohérent, visant l’excellence et la fidélité à l’oeuvre originale.

 

Dans la plus pure tradition du ballet européen, force et contrôle s’expriment sous les doux pas des danseuses, sublimant les célèbres tableaux du Lac des Cygnes (ou Swan Lake en anglais), désormais entrés dans l’image populaire des ballets classiques. Un haut niveau dansé qui nous enchante. Nous voilà partis voyageant dans un joli conte de fée surréaliste typique de l’imaginaire russe. La Russie et l’Asie nous livrent ici une ode stylisée, un hymne au superbe. Un entracte mérité nous permet de nous remettre d’autant d’émotions.

 

La chorégraphie initiale a été retouchée pour lui donner plus de modernité, elle révèle la pate experte d’Oleg Vinagrador et de Brian Yoo. La scénographie de Simon Pastukh laisse place à l’expression des corps des danseuses, mises en avant et mises en lumière avec beauté par Kyoungwon Seo. Les costumes de Galina Solovieva reprennent la tradition du classicisme russe.

 

La Valse, la Polonaise, la Danse Espagnole ou Hongroise, sans oublier la Mazurka ou le célèbre Pas de Trois, tout y est dans cette consécration vivante de la maîtrise excellente du ballet. Odette sera jouée par Misun Kang, donnant la répartie à Konstantin Novoselov qui danse Siegfried. On distinguera Jiwon Choi pour sa très belle interprétation de la Reine et Seungyun Seo pour sa danse remarquable des petits cygnes.

 

Pour cette belle découverte dansée, nos remerciements s’adressent à l’agent de presse spécialisée Sylvie Desnouveaux. Un spectacle magistral donné au Palais des Congrès au 2 Place de la Porte Maillot 75017 Paris, une belle production signée ValProd. - www.lelacdescygnes.valprod.fr et www.universalballet.com – Juin 2019

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Ariane à Naxos
au Théâtre des Champs-
Élysées

Un opéra dynamique et moderne Une fois par trimestre, nous nous réjouissons à nous rendre au Théâtre des Champs-Élysées, haut lieu historique des représentations classiques internationales présentes à Paris. Parmi la riche programmation de cette salle d’exception de 1905 places construite par Auguste Péret, notre choix s’est porté sur un opéra annoncé à grand renfort de communication, l’Ariadne auf Naxos du compositeur allemand Richard Strauss. Notre œil est attiré par ces lumières modernes, cette mise en scène annoncée. Enfin un opéra qui connaît un renouveau stylistique.

 

Il s’agit d’une production d’exception, regroupant de grands noms internationaux du lyrique. Ainsi Ariane sera incarnée par la soprano finlandaise Camilla Nyland, une grande interprète straussienne, Olga Pudova, soprano russe personnifiera la tonitruante Zerbinette, Jean-Sébastien Bou, baryton français, sera le maître du musique.

 

Ariane à Naxos est un opéra écrit à l’apogée de l’art straussien. On lui connaît deux versions, celle de 1912 présentée à Stuttgart qui fait jouer une pièce de Molière et celle de 1916 avec son prologue ajouté, présenté à Vienne, la version la plus jouée aujourd’hui. Revisitant la tradition viennoise de l’opéra de caractère, Strauss y fait jouer une pièce dans la pièce, une mise en perspective très adroite, où l’on verra l’opéra Ariane à Naxos se confronter à une opérette de style Commedia dell’Arte. Les deux troupes convoquées à l’occasion d’une fête bourgeoise vont se livrer une joute vocale pour le plus grand plaisir des spectateurs venus nombreux ce soir. Inspirée du Bourgeois Gentilhomme de Molière, Strauss conçoit ici une œuvre onirique à double narration réunie en une seule. La toute première d’Ariane Avenue Montaigne a eu lieu en 1937.

 

Nous voici dans cette immense salle classique toute de rouge et d’or vêtue, qui donne une perspective majestueuse sur tout hémicycle. Nous nous lasserons pas d’observer les fresques de la coupole de Maurice Denis qui célèbrent les arts lyriques français. L’assistance est venue nombreuse ce soir, attirée par le casting international présent sur scène. L’Orchestre de Chambre de Paris est de la partie, dirigé par le jeune talent français Jérémie Rhorer. L’OCP sera en formation dite à la Mozart, à savoir 38 musiciens. Rhorer s’est distingué notamment dans le Cycle Mozart du TCE, dont il est un grand spécialiste. L’OCP fête ici ses 40 années d’existence et nous le retrouverons à la Philharmonie, sa salle de résidence.

 

L’artiste très attendue ce soir n’est pas sur scène, il s’agit de la britannique Katie Mitchell, assurant cette mise en scène novatrice, remarquée au Festival d’Aix-en-Provence, cet opéra ayant été présenté en juillet 2018 dans la belle cité du Sud. Katie Mitchell fût remarquée en France avec Pélleas et Mélissandre en 2016 et avec Alcina en 2015. L’opéra est chanté en allemand avec des sous-titres en français et en anglais.

 

L’action commence, nous découvrons un décor Années 30, dans un appartement bourgeois de Vienne, une décoration soignée signée Chloé Lamford. Les personnages de la pièce déménagent et chantent le décor sous nos yeux, dans un ballet chanté qui donne de l’énergie à l’ensemble. Les personnages, habillés par Sarah Blenkinsop, alternent costumes des années 30 et pièces beaucoup plus modernes, on retrouvera des chanteurs en jeans, baskets et lunettes noires, donnant assurément un air bienvenue de West Side Story à l’ensemble.

 

Les rôles se mettent en place et les changements se font à vue du public, lequel est quelque peu décontenancé devant autant d’animation sur scène, avec plusieurs scénettes mimées ou chantées de part et d’autre. Pour nous, c’est très divertissant, en rupture de toute monotonie. Survient la mezzo-soprano américaine Kate Lindsey dans le rôle du compositeur qui illumine ce premier acte d’une voix fantastique, douce et enveloppante, elle donne à cet opéra tout son caractère de jeunesse et de joie. Elle communique une impulsion vive qui réveille toute la salle et nous laisse admiratifs devant autant de talent vocal.

 

Comme Monsieur Jourdain dans Molière, le commanditaire apparaît sur scène et assiste à la pièce avec son épouse. Les chanteurs font démonstration de leur talent inné et emplissent l’immense salle toute entière de leurs voix étincelantes. On distinguera l’allemand Roberto Saccà (exceptionnel) dans le rôle de Bacchus. On reconnaîtra le célèbre air de Zerbinette de 11 minutes.

 

Le livret de Hofmannsthal joue habilement avec les mises en scènes croisées, les styles mélangés. C’est la première fois que nous voyons du tragique mêlé à du comique pour un style des plus décalés et réussis. C’est inhabituel et cette facétie de Strauss s’harmonise habilement sous le jeu adroit et fin de ces acteurs-chanteurs. Une dramaturgie signée Martine Crimp et des mouvements orchestrés par Joseph Alford.

 

On s’étonne et s’amuse des tableaux présentés, certains modernes comme le cours de sport en baskets, la cigarette sur scène et le sable qui symbolise l’île grecque de Naxos. Ce tout abracadabrantesque et stylé est relevé par des éclairages leds modernes qui donnent une lecture pluritemporelle de la pièce chantée. On aime ce mix irrévérencieux et décomplexé qui réveille l’opéra allemand, c’est frais et talentueux.

 

Le premier acte laisse jeu à un duo féminin en face à face et s’achève sur une gifle magistrale. Le second acte sera plus intimiste et réunira les deux troupes sous une apothéose d’applaudissements (sauf des anciens trop perturbés par autant d’audace stylistique). L’OCP se sort avec les honneur d’un Prologue difficile, l’Acte étant plus fluide et mélodieux.

 

Olga, soliste du Théâtre Mariinsky, occupe de sa vive présence tout l’Acte. Quatre chanteurs masculins entourent la belle Zebrinette, on chante sur les tables, on sort une arme, on pleure aussi, on sent l’unicité narrative d’une scène double qui devient une, deux univers qui s’affrontent avec vigueur, mais la musique finira par convaincre tous les cœurs. On apprécie ces jeux scéniques sans voix qui se fondent dans les arrière-plans. Deux comédiens français sont sur scène, Rainer Sievert et Anna Daria Fontane, ils embellissent le jeu de cette joyeuse troupe. On est charmé des lumières futuristes et modernes de James Farncumbe qui réhaussent l’opéra d’atours contemporains.

 

Un opéra frais et fluide, deux heures de grand spectacle opératique. Nous avons apprécié un tel opéra vivant et coloré et nous saluons la performance remarquée de Kate Lindsey qui signe ici l’un de ses plus grands rôles selon nous. Kate Lindsey a été vue dans Poppée à Salzbourg l’été dernier sous la direction de William Christie. Nous recevons du service de presse un carnet de photographies des répétions signées Patrick Messina, célèbre photographe français, un doux souvenir de ce moment riche de talents remarquables.

 

Pour cette belle découverte opératique, nos remerciements s’adressent à Orane Dousse et à Amélie Deletre du service communication du Théâtre des Champs-Élysées. Photographies G&P et Vincent Pontet. Le Théâtre des Champs-Élysées, une institution émérite des arts lyriques parisiens établi depuis 1913 avec panache au 15 Avenue Montaigne, 75008 Paris– www.theatrechampselysees.frMars 2019

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Berlioz par le Palais Royal
au Conservatoire

Un concert intimiste et brillant Encore sous le charme des belles images du dernier concert du Palais Royal, Tout est Lumière, un spectacle grandiose donné à la Seine Musicale, nous nous rendions avec joie à la salle historique du Conservatoire de Paris pour vivre un autre concert mis en espace par le jeune et talentueux Benjamin Prins, toujours assisté de Pénélope Briant pour un résultat des plus réussis.

 

Avec le tandem créé avec Jean-Philippe Sarcos, dynamique directeur de cette formation classique pleine d’énergie renouvelée, ils sont en train de révolutionner l’approche du classique, en y mêlant le théâtre, le lyrique et le comique, pour créer un show du plus bel effet.

 

Nous pénétrons avec respect dans cette salle historique du Conservatoire de 959 places, une première pour nous à titre personnel. Reconstruite tout en bois et en toile, elle fut l’écrin dans lequel la Symphonie Fantastique de Berlioz fût créé. Ce concert en ce lieu est un geste fort à l’occasion de la célébration des 150 ans de la disparition du compositeur français illustre (1803-1869). Pour le refaire revivre sur scène, le duo créatif Sarcos-Prins n’aurait pas mieux choisi que le fougueux comédien français Frédéric Giroutru dit Frédéric Le Sacripan, lequel incarne littéralement le personnage haut en couleurs de Berlioz.

 

Après un rappel historique des plus éclairants du chef d’orchestre, par lequel nous apprenons qu’entre la disparition de Rameau en 1764 et l’arrivée de Berlioz après la Révolution Française qui met à mal la musique de l’ancien régime, il faudra faire appel à des musiciens italiens faute de talents en France. Le concert s’ouvre, nous sommes dans la répétition de Béatrice et Bénédict, une œuvre de Berlioz inspirée de Beaucoup de Bruit pour Rien, l’oeuvre de Shakespeare, un auteur que Berlioz admire beaucoup (il se mariera avec une actrice irlandaise). Le décor sera des plus simples, relevé par cet imposant décor amovible rouge d’époque monté pour cette occasion spéciale, donnant une sonorité accrue à la salle.

 

Pour ce 35ème concert du Palais Royal dans cette salle toute revêtue de rouge et d’or, nous nous réjouissons de belles lumières, d’un enchaînement des scènes sans temps mort et d’une exécution parfaite. Le Palais Royal renouvelle ici ses qualités d’excellence. On aime le format de cette salle qui rend la scène proche et l’on a apprécié le solo décalé d’Orlando Bass couvert par des effets de fumigène. Du grand spectacle chanté et joué, avec des pointes d’humour fort à propos.

 

La troupe chante et joue admirablement bien, comme à son habitude, soutenue par les notes gaies d’Orlando Bass, ce pianiste franco-britannique prodige que nous avions remarqué lors du dernier concert du Palais Royal. On s’amuse des changements vestimentaires de cette vive troupe, tantôt en baskets et lunettes de soleil, tantôt en smokings et robe de soirée suivant les tableaux présentés.

 

Se succèdent le meilleur de l’époque de Berlioz, donné en scènètes de vie et entrecoupés d’actions théâtrales, une époque dominée par les italiens, seront ainsi chantés Piccini, Cherubini, Salieri, Rossini et aussi Gluck, sans oublier le fameux Berlioz, pivot de ce concert (La Damnation de Faust, Tristia, Lélio, Bienvenuto Cellini et bien sur la Symphonie Fantastique).

 

Le Sacripan fait littéralement revivre avec grand brio le jeune Hector Berlioz sur scène, venu d’Isère à Paris, prédestiné par son père médecin à une carrière en médecine. L’auteur Emmanuel Reibel a fait une travail en profondeur pour nous faire revivre sa personnalité chatoyante, ses humeurs et ses doutes, s’appuyant sur les Mémoires de Berlioz, lequel fût aussi un bon auteur. Frédéric, du Conservatoire de Grenoble, du Cours Florent et du CNSAD joue de tous ses talents d’orateur pour clamer et déclamer, les murs de la salle en tremblent presque. C’est vif et percutant, nous assistons ce soir là à du grand théâtre en la personne de Le Sacripan, lequel n’a rien à envier aux chanteurs lyriques présents en arrière-scène en terme de puissance vocale.

 

Berlioz le Fantastique est le titre du concert, il porte bien son nom. Nous apprenons de la vie de l’artiste, ses errements, ses succès et ses échecs, il nous touche aussi. Le jeune acteur a travaillé avec Michel Fau et sait nous émouvoir au plus profond de nous, nous faisant voyager dans une autre époque.

 

Nous venons de vivre une belle représentation, forte et saisissante. Nous aurons plaisir à revoir la ruche foisonnante de créativité artistique qu’est le Palais Royal en mai et juin avec leur concert Offenbach en Fête. Cette même salle historique sera le théâtre des concerts Coups de Foudre, à destination des jeunes sans accès à la musique classique, autre volet éducatif de la mission de cette formation attachante. Photographies G&P et Mylène Natour. Un concert réjouissant donné dans la Salle Historique du Conservatoire, une salle consacrant les arts vivants français établie depuis 1806 au 2bis rue du Conservatoire 75009 Paris. – www.le-palaisroyal.com - Mars 2019

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Le concert Constellations
par l'ONDIF

Un doux et talentueux concert Pour célébrer la Saint-Valentin comme il se doit, rien de tel qu’un beau concert symphonique et romantique. C’est ainsi que nous nous rendons en ce 14 février sur l’invitation de l’Orchestre National d’Ile de France dans la belle Salle Gaveau du nom éponyme de l’ancien fabricant français de piano. Nous aimons cette salle pour son caractère intimiste, tel un cocon paré de bois ciselé couleur taupe à l’acoustique remarquable. Nous sommes salués par l’orgue Mutin-Cavaillé qui orne la scène, éclairé de tous les feux. Les 1020 places de la salle sont particulièrement remplies ce soir-là, ce qui fait que la presse aura du mal à s’y loger...placés en dernier rang de salle, nous sommes toutefois dans l’une de ces loges-cabines privatives et surélevées qui nous donnent une vue sur toute la scène. La cause de cette affluence est la présence ce soir du prodige français de la guitare, le bordelais Thibault Cauvin qui se produit ici dans l’une de ses rares dates parisiennes au cours d’une tournée mondiale débutée il y a plus de 19 ans.

 

Car le petit prince de la guitare est un phénomène artistique et médiatique. Après 9 albums, 1000 concerts dans 120 pays, 36 prix internationaux obtenus avant l’âge de 20 ans (il reste inégalé), le maestro va nous charmer de ses airs fins et subtils. Le jeune homme a commencé la guitare à l’âge de 5 ans, a suivi les cours du CRR de Bordeaux et ceux du CNSRDP, sorti avec les honneurs. Nous voilà excités d’assister à notre premier concert de guitare classique, une expérience inédite pour nous.

 

D’autant que la jeunesse talentueuse est au rendez-vous, avec le tandem Cauvin-Leroy. Julien Leroy est l’un des jeunes chefs d’orchestre qui montent, il dirigera la formation musique de chambre de l’ONDIF, les 95 musiciens de la formation ne sont pas présents mais nous sommes en présence de sa version rapprochée. Julien Leroy, violoniste de formation, développe un palmarès distinctif et précoce: Talent Adami 2014 (chef d’orchestre), chef assistant de l’Ensemble Intercontemporain, chef invité de l’United Instruments of Lucilin de Luxembourg, il collabore avec l’ONDIF et avec l’Orchestre National de Lorraine entre autres. Distingué par Pierre Boulez, il assiste Daniel Harding et a travaillé avec Sir Simon Rattle. Autant dire que de sincères et forts talents sont annoncés ce soir.

 

Le concert s‘engage avec la Brook Green Suite de Gustav Holsst (1933), faisant appel aux arts populaires anglais avec des accents wagnériens. Ce morceau de 8 minutes enchanteresses évoquent le quartier londonien où son auteur enseignait. On y trouve une sensibilité légère, printanière et aérienne dans ses deux premiers mouvements. Le troisième mouvement est plus dynamique. Le chef Julien Leroy nous séduit par son énergie, il fait même des révérences à son orchestre tant il s’implique dans son action, c’est un spectacle admirable qui se déroule devant nous. Cette œuvre influencera Britten, autre compositeur britannique qui est au programme de ce soir.

 

Vient la Pastorale d’Eté (1920) d’Arthur Honeger, qui fût créé le 17 février 1921 à Gaveau même avec l’Orchestre Philharmonique de Saint-Louis, il est joué ici presque jour pour jour 98 ans après ce soir. Une composition romantique, légère et poétique qui laisse libre cours à l’expression personnelle des musiciens. Nous remarquons le super-soliste vénézuélien Alexis Cardenas très remarqué dans le précédent concert Hiver Russe que nous avons couvert en ces pages. Cette troisième œuvre d’importance du compositeur franco-suisse né au Havre, trois ans avant Pacific 231 (1923) qui le fera connaître s’inspire de son voyage dans les Alpes suisses. Une fresque onirique et féerique réussie dont il dédicacera les Illuminations de Rimbaud sur sa partition originale.

 

Après ce voyage romantique fort à propos en ce 14 février, voici la Sinfonietta (1932) de Benjamin Britten, résolument énergique, symphonique, atypique avec ce jeu de cordes pincées, ces suspens, ce duo de violons qui semble improvisé tant il est rythmé, un style moderne qui marque le renouveau de la musique classique britannique. Cet Opus I composé à 18 ans révèle la vigueur du jeune compositeur anglais. C’est assurément le moment le plus intense du concert, une œuvre symphonique puissante, puis lente, achevée par une tarentelle en finale, signature de l’artiste. On se sent emportés par l’enthousiasme des musiciens de l’ONDIF, quelle vitalité!

 

L’entracte nous permet de reprendre nos esprits, pour laisser place aux Old Hungarian Ballroom Dances (mai 1949) de Gyorgi Ligeti, 10 minutes d’éloquence, magnificence et sensibilité. Le 2ème mouvement sera plus espiègle et jour franc-jeu, dans une œuvre écrite sous la contrainte de la dictature soviétique. Un joli moment d’émotion et d’intensité délivré par cet orchestre talentueux, placé sous la direction du brillant Julien Leroy qui réveille la scène de son jeu de direction virtuose.

 

Puis vient le moment tant attendu, avec l’entrée en scène du guitariste surdoué Thibault Cauvin, habillé d’une chemise colorée en rupture avec les autres artistes. Car Thibault est comme cela, expressif, simple et direct, tout comme son jeu extraordinaire sur sa simple et belle guitare du luthier français Jean-Luc Joie. Cauvin et l’ONDIF nous interprètent la Fantasia pour gentilhomme (1954) de Joaquim Rodrigo, cet illustre compositeur espagnol, aveugle à 3 ans, qui suite à la rencontre avec le guitariste d’exception Andres Segovia, compose cette œuvre de 23 minutes, magistrale. Douceur et délicatesse s’emparent de la salle à cet instant, dès les premières notes de Thibault Cauvin.

 

Voici un moment rare en classique, où le soliste prend toute la salle à coeur. De la virtuosité, du genre, un doigté inégalé sur ces cordes souples et subtiles, la réputation de Thibault qui le précède se confirme à nos yeux et à nos oreilles. Les harmonies sont fraîches et élégantes, poétiques, un solo sera même le terrain d’expression des atours de l’artiste. S’en suit un deuxième mouvement, plus dynamique, qui s’achève sous une ovation du public, saluant le duo Cauvin et Leroy, tels deux jeunes prodiges de la nouvelle scène musicale classique française. Qu’il est beau de voir que les nouvelles générations s’emparent de cette musique pour la rendre contemporaine et actuelle.

 

La foule demande un rappel, le jeune Cauvin remonte sur scène, ré-accorde sa guitare puis se lance, exécutant un Rocktypicovin, une œuvre pour guitare composé par son père le musicien Philippe Cauvin, lequel est dans la salle ce soir-là; ce titre constitue le cadeau d’anniversaire de ses 13 ans (déjà avancé!), une sensibilité très espagnole, l’artiste est décidément très doué, il frappe ses cordes et même sa guitare, bam nous reçevons une masterclass de guitare classique en direct. Puis en second rappel vient Un dia de Noviembre, composé par Leo Brouwer, une ode plus romantique et poétique qui charme toute l’assistance, laquelle applaudit et lance des bravos. Un final en apothéose de délicatesse.

 

La mannequin française, pianiste et auteur Marie Wagener-Selepec qui nous accompagne ce soir là et célébrant sa première à la Salle Gaveau, nous confie son impression de ce concert: «C’était waouw, c’était beau, et plus que parfait pour un soir de Saint Valentin! Jamais déçue par cet orchestre que l’on a vu récemment à la Philharmonie. En bouquet final, un solo de Thibault Cauvin dit le « petit prince » de la guitare, il mérite bien ce surnom séduisant! Ce virtuose est sympathique, souriant, chaleureux, on le sent passionné et c’est communicatif. Après avoir brillamment accompagné l’orchestre, il nous à parlé de son père musicien comme lui, avec une grande émotion puis nous a joué un morceau magnifique qu’il lui jouait probablement le soir avec amour lorsqu’il était enfant. Un moment d’une grande sensibilité sur un air tout à fait original, hors du commun, à son image. Merci pour ce grand moment. » 

 

A la signature-dédicace de son dernier album Cities II en sortie du concert, rendez-vous est pris avec le jeune maître de la guitare pour son concert solo donné le 19 février à l’Espace Pierre Cardin-Théâtre de la Ville. Un showcase personnel qui s’annonce fort en émotions, avec en featuring deux personnalités invitées sur l’album, le conteur malien Ballaké Sissoko et son kora magique ainsi que la jeune mezzo-soprano franco-italienne qui monte, Léa Desandre, que nous avions déjà remarquée en ces pages à l’Opéra Comique dans son rôle solo pour Et in Arcadia Ego.

 

Les prochains rendez-vous de l’ONDIF, ce bel orchestre français créé en 1974 que nous avons plaisir à suivre cette saison, sont donnés pour le 15 mars à la Grande Salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris pour le concert intitulé La Cinquième (Bach, Mahler) et le 22 mars en ce même lieu pour le concert Liberté! (Chopin, Chostakovitch). Nos remerciements s’adressent à Ludmilla Sztabowicz de l’Orchestre National d’Ile de France. Photographies: G&P et Yann Orhan. Salle Gaveau, une salle parisienne agréable et intimiste établie depuis le 3 octobre 1907 au 45 rue la Boétie 75008 Paris - www.orchestre-ile.com - Février 2019

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Concert Hiver Russe
par l'Orchestre National d'Île de France

Un concert riche et magistral Chaque hiver, nous avons pour plaisir de nous réfugier dans le doux cocon qu’est la grande salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris, pour prendre part à un grand concert classique qui réchauffe les coeurs. C’est le cas de ce concert fort annoncé Hiver Russe donné par l’Orchestre National d’Ile de France (ONDIF) qui nous invite avec générosité ce soir du 29 janvier 2019. Une grande ouverture sur un répertoire créatif et russe salué par une neige généreuse fort à propos pour nous mettre dans l’ambiance de ces réjouissances.

 

Nous pénétrons dans les halls modernes et blancs de la Philharmonie, la foule d’aficionados est venue nombreuse ce soir pour admirer l’un des concerts les plus en vue du mois. Nous remarquons que tous les âges sont représentés, ce qui n’est pas si courant en classique. C’est certainement le signe évident de l’engagement de cette formation dans des actions culturelles au sens large, l’ONDIF étant l’un des 20 orchestres au monde les plus impliqués dans l’action envers les jeunes et tous les publics. Cette formation fondée en 1974, résidente à la Philharmonie, transmet sa passion pour la belle musique à l’occasion de plus de 100 concerts par an. Ses 95 musiciens sont d’excellent niveau, habilement dirigés par Enrique Mazzola depuis 2012. Un orchestre qui aime explorer d’autres contrées musicales, telles des musiques de film (avec un studio dédié à cet effet, des ciné-concerts aussi), on l’a vu jouer du Air, du Louis Amstrong et encore des pièces contemporaines. On le retrouvera hors ses murs notamment le 14 février pour le concert Constellations à la Salle Gaveau ou encore jouant du Star Wars en mars.

 

Tous ces talents hors nome (citons la super-soliste Ann-Estelle Médouze ou encore le soliste Stefan Rodescu) sont très attendus ce soir car le programme est à la hauteur de la réputation de cette formation dynamique et créative: la première française de la dernière création contemporaine Glorious Clouds du compositeur japonais résident à Londres Dai Fujikura, une œuvre dont la première mondiale s’est tenue à Cologne le 2 novembre 2018. Suivi du Concerto pour violon N°2 en sol mineur de Serge Prokofiev, l’un de deux seuls concertons pour violon du compositeur ukrainien, avec l’interprétation d’une star française du violon, le jeune maestro Nicolas Dautricourt. L’entracte laissera place aux fameuses Danses Symphoniques op 45, la dernière et certainement la plus grande œuvre du compositeur russe Sergei Rachmaninov. Un magnifique programme donnant le La de la diversité, placé sous la direction de l’étoile montante des chefs d’orchestres outre-manche, le surdoué Jamie Phillips.

 

Nous avons hâte de découvrir ces œuvres inédites à nos oreilles. Nous voilà placés en premier balcon, ayant une vue d’ensemble sur l’orchestre et des rutilants instruments, ses musiciens habillés de robes de soirée et de smokings, avec un public disposé à 360 degrés, sous les bois vernis de cette immense salle signée Jean Nouvel et Brigitte Métra. Les 2400 places de la salle sont toutes occupées ce soir. Le silence se fait, voici les musiciens en position, sous les applaudissements généreux, entre le jeune chef d’orchestre anglais Jamie Phillips.

 

Phillips est un prodige de l’orchestration, lui qui fût primé à l’âge de 21 ans au Salzburg Conducting Award, est devenu le plus jeune chef d’orchestre de la formation classique la plus ancienne du Royaume-Uni, le Hallé Orchestra (Manchester, 1858), dirigé par Sir Mark Elder. Phillips a dirigé le Los Angeles Philharmonic, le London Symphonic Orchestra et bien d’autres, en France, l’Orchestre d’Auvergne (2018).

 

La toute jeune œuvre du surdoué japonais de la composition Dai Fujikura (Osaka, 1977) commence. Il s’agit d’une œuvre symphonique résolument contemporaine, asbstraite, une co-commande de l’ONDIF pour lequel Dai fût en résidence à l’ONDIF ainsi qu’au Nagoya Philharmonic Orchestra. Elle est une évocation symbolique d’un monde fascinant pour le jeune compositeur, dont on a vu d’autres pièces résolument inspirées des sciences (tel Solaris). Le jeune artiste s’inspire avec brio de cette vie invisible multiple qui règne dans le monde végétal et animal, il est allé jusqu’à rencontrer de grands scientifiques tel le Dr. Satoshi Omura (Nobel 2015 de médecine), pour parfaire ses recherches, c’est un artiste qui va jusqu’au bout des choses. Son œuvre est très abstraite, vive et complexe.

 

Il est sujet ici de la figuration sonore de la vie des microbiotes qui sont partout autour de nous, qui sont tous en symbiose, formant un tout constructif, telle une architecture orchestrée immense tout en étant subtile. La symphonie est brillante, ponctuée et avec quelques airs japonais forts à propos. C’est une pièce qui exprime toute sa modernité, avec chaleur et espièglerie, on se réjouit d’autant d’audace dans la composition, nous livrant des sons inédits à nos oreilles européennes bien habituées aux grands classiques. Un vent de fraîcheur souffle sur la Philharmonie à ce moment présent, une œuvre qui sied fort à propos au design ultra moderne de la salle.

 

On y sent une grâce, une jovialité fine, contrebalancée par des passages plus graves et sonores. On aime ses détournements, tels des xylophones joués à l’archet, les cors joués en sourdine. 15 minutes de découverte sensorielle inattendue, qui nous réjouit de nouvelles émotions musicales. Les 60 cordes de la formation s’en donnent à coeur joie, leur plaisir n’est pas feint. L’élève d’Edwin Roxbourg, Prix Silver à Venise réitère une belle œuvre au sein de l’ONDIF, lui qui avait initié une collaboration réussie avec l’orchestre francilien avec Ghost of Christmas (Fantôme de Noël) adapté des Christmas Carol (1843) de Charles Dickens. Virtuosité et talent vont de pair chez ce compositeur japonais attachant qui vient saluer le public parisien qui le reçoit avec chaleur ce soir là. Dans cette métaphore ludique et enchanteresse, on perçoit un travail méticuleux, précis, hors normes. Avec cette vue sur l’orchestre classique et ce son si avant-gardiste, c’est l’ancien et le moderne qui se marient avec grandeur ce soir. Une célébration réussi de la musique de demain.

 

Après autant d’effusion, place au recueillement, avec l’entrée d’un autre prodige, le violoniste français Nicolas Dautricourt (1977), Adami 1999, CNSM à l’age de 16 ans (1er prix), l’un des solistes les plus en vue du moment. Dautricourt est un maître passé par les enseignements de Philip Hirschhorn et du français Gérard Poulet entre autres. Grand amateur de classique, il explore également l’univers du jazz (on l’a vu à Jazz in Marciac et Jazz à Vienne notamment), il est reconnu pour un engagement sensible et passionné dans son interprétation, autant de promesses nous réjouissent.

 

Le Concerto pour Violon N°2 en sol mineur s’engage, alliant finesse et légèreté. La performance de Dautricourt saute aux yeux, magnifié par un tel orchestre d’excellence: tout simplement stupéfiant, avec une clarté et une profondeur de jeu dépassant l’entendement du réel. Dautricourt joue, il emplit la salle à lui tout seul, notamment dans ses passages en soliste. L’assistante, bouche bée, écoute la grâce de son jeu. Certainement l’un des meilleurs solistes violon vus à ce jour nous concernant.

 

L’oeuvre de Prokoviev est jouée à merveille. Elle est présentée une première fois en présence d’un autre génie français du violon, Robert Soetens, le 1er décembre 1935 par l’Orchestre Symphonique de Madrid. Nous voici embarqués dans 25 minutes de plaisirs symphoniques réunissant 50 cordes. Ce second concerto est bien différent du premier écrit 20 ans plus tôt à Saint-Peterbsourg, il est héroïque, constructif, tout en finesse comme le soulignait son ami Francis Poulenc. Majestuosité, force et finesse caractérisent ce premier mouvement. Une récurrence sourde opère aussi, avec des notes tantôt amusantes, tantôt dramatiques. Une complicité s’installe entre Dautricourt et Phillips, qui allient tous deux un talent remarquable. Le second mouvement est empreint de romantisme et de fraîcheur, avec des clarinettes en vedette, des castagnettes y font même irruption. Le troisième mouvement est plus relevé, il donne toute sa force à l’expression du violoniste français, lequel joue sur un Antonio Stradivari fait à Crémone en 1713, le Château Fombrange.

 

La salle applaudit avec force un tel exploit musical. Puis vient un bis improvisé, entre Dautricourt et le supersoliste de l’orchestre d’origine vénézuélienne, Alexis Cardenas, intitulé Spain. Un tour de force duettiste donnant toute la puissance des deux violons. Cardenas vit tellement cet instant qu’il frappe même du pied. Un mini-concerto des plus vifs, qui remplit la salle de hourras.

 

L’entracte bien mérité nous fait suivre le jeu du billet caché dans les programmes, une invitation pour les prochains concerts de l’ONDIF, nous voilà comme des enfants. L’oeuvre qui s’annonce est magistrale, puisqu’on parle des Danses Symphoniques Op. 45 de Rachmaninov, écrite à la fin de sale vie, présentée le 3 janvier 1941 par l’Orchestre Symphonique de Philadelphie sous la direction d’Eugène Ormandy. 36 minutes réparties en trois mouvements allégoriques de la vie (le jour, crépuscule, minuit), une œuvre riches de jouissances esthétiques et sonores, qui continue Tchaikovski par la sensibilité de l’âme russe. Une oeuvre poignante et fantasmatique, dont le titre originel était Danses Fantastiques.

 

Nous voici à nouveau dans l’immense salle moderne Pierre Boulez, l’orchestre au complet prend place, sous la direction brillante de Jamie Phillips. Se joignent à la formation cor anglais, clarinette basse, saxophone alto, contrebasse, piano, harpe, xylophone, glokenspiel et carillon tubulaire. Tout est prêt, la salle fait silence. Boum, l’oeuvre éclate, puissante, géante, dans un premier mouvement magistral, d’une énergie folle. Le son pur et fort de la salle se révèle soudain à nous, le concert prend à cet instant toute son envergure. L’orchestre joue avec brio, dans une précision absolue. Le jeune chef anglais est en extase dans l’action vive, il dessine des arabesques dans le ciel, joue tel un comédien, un mime vertigineux l’habite. Quelle énergie de toutes parts! A ce grandiose suivent des passages doux et romantiques, avec justesse et adresse. L’oeuvre nous charme instantanément, c’est le véritable coup de foudre fait de cette brillante alliance entre l’oeuvre, l’ONDIF et l’excellent Jamie Phillips.

 

Le deuxième mouvement sera plus doux et laissera place à l’expression du super-soliste Cardenas. Nous sommes ici dans le romantisme dans toute sa splendeur, tout l’orchestre est sollicité, on y entendra même des cloches. Le troisième mouvement allie gravité et légèreté. Poursuivant la tradition romantique du 19eme, l’oeuvre de Rachmaninov est empreinte d’effets que ni Chopin ou Rimski-Korsakov n’auraient renié. On rélèvera la clarté de l’écriture du génie russe, dans ces trois mouvements non allegro, andante et lendo assai. Le troisième mouvement est frais et printanier, l’orchestre donne tout et en premier lieu son chef virtuose, on jouera même du gong dans cette apothéose de savoureuse réjouissance musicale.

 

Nous venons d’assister à un concert incroyablement vivant, riche d’une programmation de premier choix. La foule ressort de la Philharmonie sous la neige toujours, comblée. La mannequin française Marie Wagener, mélomane, auteur et pianiste à ses heures se délecte à nos cotés d’autant de mélopées fantastiques de symphonies lyriques qui charment nos sens. Elle nous partage son vécu: «Je déteste être en retard mais le suis souvent malgré moi... Ce coup-ci j’ai compris la leçon: ne pas arriver en retard à la Philharmonie sous peine d’être punie la moitié du spectacle en rang supérieur. Par contre cela vaut le détour, une belle salle alliant esthétisme architectural et musical avec une qualité de son se répandant uniformément, s’élevant progressivement dans la salle circulaire et sans perdre en intensité d’un balcon à l’autre. Je me suis sentie en immersion totale, les notes voyageant de mon oreille jusqu’à mon ventre sous forme de secousses agréables. Première fois que je vais à la Philarmonie, pas déçue de la balade. J’ai pu regagner ma place à l’entracte et profiter plus profondément encore de cette belle représentation de Rachmaninov, Prokokiev et surtout de Dai Fujikura en première partie qui m’à profondément touchée par des sensations d’angoisse puis d’apaisement dont il sait habiller l’espace sonore à sa guise.»

 

Pour un tel moment rare de joies symphoniques, nous remerciements s’adressent à Ludmilla Sztabowicz du service communication de l’ONDIF. Photographies: G&P, Bernard Martinez, Benjamin Ealovega, Ruben Olsen Lærk. L’Orchestre National d'Île-de-France, une formation française prestigieuse établie depuis 1974 au 19, rue des Écoles, 94140 Alfortville - www.orchestre-ile.com - Février 2019

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Le Palais Royal
à la Seine Musicale

Un concert virtuose et magique – Si nous avons peu couvert de concerts classiques cet automne en raison d’un reportage prolongé sur les terres ensoleillées d’Espagne, il fallait que nous assistions à celui-ci sans manquement possible: une apothéose de joie lyrique à réchauffer tous les coeurs cet hiver. Nous avions certes déjà entendus et lus en ces pages tous les éloges de notre rédaction faite sur le tout premier concert de ce nouvel opus réussi de cette jeune formation vivante qu’on aime, Le Palais Royal. Ce grand concert théâtralise, intitulé Tout est Lumière, une création de mars 2018, est directement inspirée de poème éponyme de Victor Hugo (repris ensuite par Ravel). Nous nous devions personnellement d’assister à ce concert vivifiant et brillant tant il était couvert de louanges. D’autant plus qu’il est donné ce soir du 25 janvier dans le Grand Auditorium de la Seine Musicale, parfait décor et joli cocon tout de bois vêtu, lieu idoine pour une telle célébration des arts français, les Ars Gallica si chers à Saint-Saëns.

 

Nous pénétrons dans l’immense salle dessinée avec grâce par Shigeru Ban et sa chaleur communicative nous apaise. Les beaux sièges larges et confortables, revêtus de rouge nous accueillent volontiers et petit à petit, les 1150 places se remplissent d’un public de fidèles afficionados de cette formation qui diffère des autres formations classiques parisiennes. On sent chez eux un formidable élan toujours renouvelé de communiquer une passion inébranlable en la musique classique, pour notre plus grand bonheur. Sur scène, on accorde un piano d’époque, sur lequel le jeune talent franco-britannique Orlando Bass nous fascinera de douces sonorités. Nous voici admiratifs de cette architecture grandiose, conçue en vignoble de bois, qui sied si bien à des concerts classiques, avec cette particularité d’avoir un public disposé à 360 degrés, c’est-à-dire faisant le tour entier de la scène.

 

Les applaudissements fusent à l’entrée de l’orchestre, des 33 chanteurs-acteurs et du charismatique Jean-Philippe Sarcos, l’un des chefs français qui monte et que nous trouvons touchants par son humilité, son approche et son accessibilité, lui qui fût l’élève de William Christie, excusez du peu. Le chef nous présente, comme à son accoutumée, la genèse et l’histoire de ce concert, avec son accent chantant du Sud. Une performance placée sous le signe de l’héritage musical français puisque seront présentées ce soir, entre autres: Le Printemps de Debussy l’anticonformiste, la Matinée de Provence de Marcel l’impressionniste ou encore Les Saintes Maries de la Mer Dans la Vigne de Paladilhe, un chef d’oeuvre français oublié. Sarcos, élève de l’émérite chef français Georges Prêtre, a une fine connaissance de cette période musicale française riche, étudiant Bizet ou Poulenc notamment.

 

Le concert peut commencer. A cet instant, il est immédiatement interrompu par une intervention en public: il s’agit de la soprano Marina Ruiz qui harangue le chef puis monte sur scène: voici l’une des pirouettes scéniques du jeune et brillant Benjamin Prins, ce normand de Lisieux issu de la renommée Ecole Supérieure des Arts Dramatique de Vienne (2007), reconnu en Allemagne, qui va nous réjouir d’agréables saynètes-interludes tout au long du spectacle. Son acolyte Pénélope Driant (Cours Simon, Ecole des Chartres), grande spécialiste du mime, y a aussi mis tout son savoir théâtral pour nous livrer un format de concert unique en son genre: l’opéra-théâtre lyrique. Le duo Sarcos-Prins fonctionne à merveille et à eux deux ils redéfinissent un nouveau style qui dépoussière le concert classique, on s’en délecte. Nul doute que leur prochaine œuvre conjointe en préparation, Episodes de la vie d’un artiste (sur Berlioz, présenté en mars 2019) sera d’une aussi grande qualité scénique.

 

L’action commence et nous voici vite embarqués dans un voyage musical beau et léger, avec cette ouverture sur le fameux Aquarium, Carnaval des Animaux de Saint-Saëns. Nous voici recueillis devant autant de beauté, servis par un son de salle d’une qualité exceptionnelle. Le premier violon solo Nguyen Nuu Nguyen s’y distingue, tout comme chaque membre de cet orchestre qui joue à la perfection. Sur scène, le jeune prodige du piano Orlando Bass, passé par les classes de Roger Muraro et de Jean-François Zygel, nous sert un jeu fin et très expressif, au plus juste des partitions des maîtres de ce soir, tels Fauré (Pavane), Widor le symphonique (La Toccata) ou encore Gounod (Ainsi que la brise légère).

 

Ce premier morceau joué, sous les applaudissements de la salle (ici on applaudit, le classique se lâche ce soir), nous assistons à l’entrée en scène des chanteurs de la soirée, à parité de femmes vêtues de robes de bal rouges et d’hommes tous en smoking de grand gala. Nous sommes dans les salons de la célèbre baronne Pauline Von Metternich, qui refait vivre les fêtes impériales parisiennes. On se croirait dans un film de Fellini, c’est si bien joué, les acteurs-chanteurs se donnent tous à corps et à coeur-joie, c’est enthousiasmant de voir tant de jeunes talents (déjà confirmés) avoir du plaisir à transmettre sur scène et avec quelle puissance vocale collective! Farces et contrepéteries vont bon train sur le plateau et les titres s’enchaînent avec une fluidité naturelle (Saint-Saëns, Coeur des Sylphes), Gounod (Farandole), Fauré (Les Djinns). Entre en scène Victor Hugo incarné avec panache par le comédien Philippe Girard (du Théâtre National de Chaillot). Celui-ci, placé dans le public, jouant des multiples balcons de la salle, déclame ses vers et apostrophes les comédiens, un jeu de croisés s’en suit, nous voici au théâtre. La musique repart et nous voici à nouveau dans le chant lyrique, nous savourons cette mise en espace de génie, qui nous fait entrer dans une expérience immersive grandiose.

 

Quel spectacle, quelle audace! On aime ce classique décomplexé et remis en scène. Le jeune Bass se transforme tout à coup en véritable showman lorsque changeant de piano, il exécute un immense showcase de son talent sur un Steinway étincelant, sans partition comme le veut la tradition du Palais Royal. Une boule de discothèque géante subitement illuminée remplit la salle de lumières magiques tournoyantes. Tout simplement féérique!

 

Nous n’avions rarement vu un tel concert classique, hors cadre, riche de romantisme, de talents innés et d’innovations scéniques. Le public est conquis, d’autant plus que le final (Gounod, Faust) est chanté parmi le public.

 

Nous avons hâte d’être encore surpris et émerveillés par Le Palais Royal, jeune formation qui devient grande, au cours de son programme de l’année 2019: Berlioz en mars, Haendel en avril, Vivaldi en mai et Offenbach en juin (au fameux Cirque d’Hiver). Des rendez-vous que nous prenons volontiers, tant cette joyeuse équipe est attachante. Elle nous donne envie d’aimer le classique et donne aussi en retour, au travers de concerts coups de coeur, caritatifs ou auprès de jeunes publics. Un élan qui allie générosité et excellence, à l’instar de son chef d’orchestre motivant ses troupes pour nous livrer un concert d’exception, certainement l’un des plus brillants de ce début d’année.

 

Après Orient Express l’année dernière, Le Palais Royal réitère ses concerts à succès avec cette maestria collective énergique, un vent de fraîcheur souffle résolument sur la scène classique française. Crédits photos: G&P et Mylène Natour, Laurent Prost, Martin d'Hérouville. Nos remerciements s’adressent à Margaux Heuacker du Palais Royal. La Seine Musicale, une nouvelle grande et belle salle parisienne de concerts établie sur l’Île Seguin, 92100 Boulogne-Billancourt www.laseinemusicale.com Le Palais Royal, une formation classique française d’excellence établie avec brio au 3 rue Vineuse 75116 Paris – www.le-palaisroyal.com - Janvier 2019

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Le CCN Ballet de Lorraine
au Palais de Chaillot

Le mystère fait un sans faute – Au riche programme du Théâtre National de Chaillot, il est des compagnies dont nous guettons la venue, parmi elles, l’une des figures phares de la danse contemporaine française, le CCN Ballet de Lorraine, qui nous charme à chaque édition d’oeuvres touchantes, inspirantes, pleines de vie et d’ambitions. C’est donc tout naturellement et avec une certaine excitation que nous assistons à la grande première de leur nouvelle œuvre, Plaisirs Inconnus, présentée pour la première fois à Londres en 2016 mais en primeur ce soir pour nous à Paris. Une œuvre moderne magistrale ce soir.

Nous nous engageons dans la grande salle Jean Villar, déjà pleine en ce jeudi soir, et nous y croisons d’autres membres émérites du SJPP, tous aussi férus de danse que nous. Il faut reconnaître le sujet peu facile, tout public ne peut y trouver son attrait mais ici, l’auditoire est déjà conquis à ce grand nom de la danse française, laquelle bénéficie d’un rang international reconnu.

Le CCN s’est d’ailleurs arrogé les auspices d’un directeur artistique de talent, en la personne de Peter Jacobsson, qui sera également sur scène ce soir, à l’instar de son acolyte Thomas Caley, autre grand danseur international (ainsi qu’Emma Gladstone, collaboratrice confirmée). Jacobsson insuffle depuis six saisons un nouveau rythme au CCN Ballet de Lorraine et cette pièce dansée en cinq actes fait aussi office de rétrospective du parcours artistique du maître au sein du ballet. Jacobsson, ancien danseur étoile du Saddler’s Well Royal Ballet puis au Royal Opera House de Stockholm avait ses fonctions au Ballet Royal de Suède avant d’être appelé au CCN en 2011, pour succéder à Didier Deschamps, actuel directeur de Chaillot. Autant dire qu’en ces lieux, le CCN est comme à la maison. Nous remarquons à ses côtés sur scène la présence de Thomas Caley, ancien danseur de Merce Cunnigham de 1994 à 2000 qui se démarque par un style fin et racé.

L’intérêt de cette œuvre collective présentée est son caractère totalement anonyme, faite comme un tout cohérent et rassemblant cinq chorégraphes mais dont les noms nous sont volontairement cachés, tout comme le directeur des lumières, du son ou même les costumières. Tout est mis en œuvre pour que le génie créatif se libère instantanément, sans arrières-pensées, ni pour déplaire à un public dans l’attente d’un nom ou de l’artiste en appréhension du quand-dira-t-on. Liberté et énergie seront les maîtres-mots de ce grand tableau, réunissant dans un effort collectif suprême le meilleur du CCN, avec l’ajout de chorégraphes invités, soit au total quatre femmes et un homme, pour 26 danseurs sur le plateau.

La scène s’ouvre, immense, aux coulisses apparentes. Face à elle, un mur translucide multicolore. Les danseurs s’échauffent derrière ce mur coloré qui nous fait penser aux vitraux des églises. Les derniers spectateurs s’installent, les lumières s’éteignent petit à petit, puis silence: le mystère commence. Face à nous, une puis deux, puis trois danseurs-chanteurs, ouvrent la narration avec l’un des interludes qui ponctueront notre parcours initiatique pendant 1h15 de danse merveilleuse. Une jeune femme s’approche en bord de scène. Pieds nus, elle commence à marquer le tempo. Puis son corps se désarticule, ses mouvements se répètent au son d’une musique de plus en plus forte, de plus en plus angoissante. Deux autres artistes la rejoignent. Ils paralysent la salle par leurs mouvements saccadés et répétés mais également par leurs cris et leurs chants. Une évocation latine ou asiatique, faisant appel à des chants ancestraux. 

Une ode à la nature certainement, qui introduit à propos le premier tableau: une évocation instinctive, animale, de la nature et de ses éléments. Les danseurs hommes et femmes, vêtus de jeans bleus et de t-shirts blancs, fondent sur la scène puis forment des énergies, des vibrations, ondes et courants qui nous font penser à la mer, sous un rythme puissant. Si West Side Story n’est pas loin, c’est en réalité une vue poétique de l’homme et de sa nature qui nous est livrée ici. Une vingtaine de danseurs s’imposent sur l’immense scène. Tous vêtus d’un jean, de chaussettes blanches et d’un t-shirt blanc: leur uniformité nous hypnotise, nous intrigue et nous emporte dans leur univers. Cette première chorégraphie, nous envoûte et nous donne presque le mal de mer. Nous soulignons l’incroyable synchronisation des mouvements et des déplacements. De sexes et de gabarits différents, tous les jeunes danseurs ne font plus qu’un. Ils tournent, avancent et s’alignent puis nous remarquons que chacun d’eux portent sur leur t-shirt blanc une inscription, plus précisément une lettre. Ensemble ils forment une phrase voire un message sur le monde d’aujourd’hui. Mais nous vous laissons le découvrir par vous-même… Un premier tableau grandiose, qui donne le ton, le souffle de la représentation à laquelle nous assistons les yeux ébahis. Belle, admirable, presque envoûtante, l’oeuvre nous fait nécessairement penser à la mer, comme si toute la troupe se fondait en un seul élément, comme un hypnose collective joyeuse. La danse est brute et vive, l’exécution parfaite. 

Cette formidable présence scénographique laisse place au tableau des trois couples enlacés, qui se font, se défont, combattent. Un hymne à l’amour et à la passion. Une œuvre poétique, légère et à la fois forte qui laisse transpirer l’humain et sa beauté. Une épure d’émotions dansées, que l’on retiendra pour sa douceur. Trois couples se présentent à nous et nous racontent leur histoire. Chaque duo se trouvent dans leur bulle, dans leur îlot de lumière avant de rejoindre les autres pour faire de fabuleux ensembles chorégraphiques. Le romantisme est ici à sa plénitude. Nous ne résistons pas longtemps à nous émouvoir par chacun de leurs gestes qui racontent l’amour, la vie de couple, la vie tout simplement. Le choix de costumes minimalistes pousse au réalisme de cette scène et nous nous prenons d’affection pour chaque duo, différents et pourtant si semblables à la fois. 

Puis vient l’énergie, la lumière, l’or. Tels des dieux grecs, les danseurs du CCN, tout d’or vêtus, se présentent à nous. Fluidité et puissance des gestes s’allient à la beauté des harmonies chromatiques, le tout sur un imperturbable fond noir. Nous sommes résolument dans le minimalisme ici avec la ferveur donnée par tous ces danseurs que nous trouvons admirables par la précision requise à l’exécution de tous leurs gestes. 

Vient ensuite l’un des moments rares de la danse contemporaine: une réinterprétation magistrale du Boléro de Ravel, exécuté avec puissance et fougue. On se sent volontiers transporté en Espagne devant ces fiers toréadors et ces Carmens qui s’exclament, se meuvent telles des pantomimes en ombres chinoises. C’est beau et puissant, saisissant. Immense coup de cœur pour le tableau final  , comme un chef d’œuvre. Par petits groupes, les danseurs traversent la scène. Le mécanisme de leurs gestes répétitifs nous rappellent la mythique scène de Charlie Chaplin dans Les Temps Modernes le tout dans un esprit comédie musicale de Broadway où le féminin et le masculin se réconcilient à la fin. Ce Boléro de Ravel revisité nous émeut depuis notre siège. Et nous en voulons encore et encore.  Très certainement, l’un des plus beaux Carmen vus dansés, saluons ici l’inventivité et la créativité de tout l’équipe du CCN qui se renouvelle à chaque saison avec des œuvres toujours plus étonnantes. Nous quittons les lieux avec des étoiles dans les yeux, riches de ces belles images vivantes vues ce soir.

Le CCN  Ballet de Lorraine nous a fait vibrer, voyager et rêver. Nous tenons à féliciter le travail et la rigueur de chaque danseur. Bravo aux cinq chorégraphes mystères. Nous ne sommes une fois de plus pas déçu par cette nouvelle sélection du Théâtre de Chaillot. Nous vous invitons à découvrir cet incroyable et majestueux ballet avant le 25 janvier 2019. Pour ce spectacle admirable, nos remerciements s’adressent à l’attachée de presse émérite Catherine Papeguay du Théâtre National de Chaillot ainsi qu’à notre rédactrice Célia Baroth de l’IEJ de Paris. Photographies: G&P et Arno Paul. Le Théâtre National de Chaillot, un haut lieu des arts vivants célébrant la danse depuis 1937, établi avec majesté au 1 Place du Trocadéro, 75016 Paris -  www.theatre-chaillot.fr et www.ballet-de-lorraine.eu - Janvier 2019

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Carmen, Opéra en plein air
au Château de Sceaux

Un opéra magnifique dans un cadre majestueux – Il y a un spectacle en particulier qui, chaque année, marque pour nous le réel commencement de l’été: il s’agit de l’Opéra en Plein Air, créé en 2001, dont la riche saison débute traditionnellement au Château de Sceaux. De juin à septembre, ils traversent la France en proposant des représentations dans des sites remarquables de l’hexagone. C’est ainsi qu’en ce 15 juin, nous voici conviés par la production du Moma Group à assister à la grande première de l’opéra Carmen au sein de l’un des plus beaux parcs de l’Île de France. Craintifs qu’une météo hasardeuse ne gâche la fête, nous voilà rassurés le Jour J lorsqu’un beau ciel ensoleillé salue les préparatifs de ces réjouissantes festivités.

 

Le domaine de Sceaux est un lieu impressionnant par sa grandeur et par sa beauté : nous sommes au cœur d’une vaste superficie de 180 hectares. Le Parc de Sceaux, un jardin à la française réalisé par André Le Nôtre, a été labellisé « Jardin remarquable », et cet adjectif lui va à ravir. De nombreux édifices historiques le jalonnent : en effet, le domaine de Sceaux se révèle être également un lieu chargé d’histoire. Le Château de Sceaux, devant lequel nous passerons une soirée riche en musique, a été réalisé par l’architecte Jean-Michel Le Soufaché pour le duc et la duchesse de Trévise. Le monument est magistral : cette imposante demeure nous emporte instantanément en des temps royaux. Sa construction commencera en 1856, et la réalisation prendra quelques années. Construit sur l’emplacement du château de Jean-Baptiste Colbert lequel sera malheureusement détruit par la suite, l’actuel Château de Sceaux est aujourd’hui un monument historique très bien conservé et un joyau du passé. Le domaine se compose également d’édifices à ne pas manquer : l’Orangeraie, le Petit Château, le Pavillon de l’Aurore ainsi que les Écuries. Un musée présente ses œuvres au sein de ces différents bâtiments.

 

Le public est venu nombreux ce soir-là, se rassasiant de petites collations bio ou de fin champagne avant le début du spectacle fixé à 20h30. Quelle belle contemplation que ce décor de la façade rénovée et étincelante du Château de Sceaux. On ne peut rêver d’un plus beau cadre pour un opéra français. Assister à un opéra en plein air l’été est une expérience enthousiasmante, elle augure de tous les festivals de l’été que nous aurons loisir de couvrir.

 

Le spectacle s’apprête à commencer et le parrain de la saison, le comédien Antoine Duléry, salue le public et rappelle l’esprit de l’opéra en plein air : donner à tous sa chance dans le monde lyrique en soutenant les jeunes talents et permettre également à un plus large public de connaître l’opéra en faisant sortir celui-ci de ses murs. C’est ainsi que cette saison transportera Carmen au Château du Champ de Bataille en Normandie, au Château de Carcassonne, aux Invalides en septembre et dans bien d’autres lieux remarquables de France.

 

Le personnage de Carmen est sûrement l’un des plus célèbres de la littérature. À l’origine, Carmen est une nouvelle de Prosper Mérimée. Elle raconte l’histoire d’une jeune femme dont le charme ne laisse aucun homme de marbre. Le célèbre opéra de Bizet commence, et nous voici plongés dans ce doux conte espagnol, mais aussi dur par son histoire mouvementée, romantique et passionnelle, qui finit par la mort de la principale protagoniste. Cet opéra se distingue également par l’histoire de sa réception : présenté en France à l’Opéra-Comique le 3 mars 1875, il reçut une flambée de critiques acerbes et horrifiées. Depuis, l’opéra de Bizet a pris sa revanche puisqu’il est de nos jours le plus joué au monde après La Traviata. Ce qui a été jugé choquant et violent à l’époque est devenu au fil du temps la pièce opératique la plus enthousiasmante saluée dans le monde entier. Un chef-d’œuvre des arts lyriques français nous est présenté, nous voilà partis pour trois heures de grand show, en quatre actes.

 

L’opéra commence et nous sommes portés par des voix remarquables, celle de Carmen jouée par Gala el Hadidi (en alternance avec Marion Lebège) ou celle de Don José, joué par Eric Fennel. Un duo incroyable à la puissance vocale remarquée.

 

Le décor peint et classique s’associe aisément avec le château en arrière-plan et la première scène s’ouvre sur le fameux épisode des soldats rencontrant les cigarières à la sortie de leur travail. Dès lors, le personnage principal est campé : Carmen, la femme fatale par excellence, attisant le désir de tous les hommes. L’autre personnage clef de la pièce, Don José, semble indifférent, mais succombera vite aux charmes de la belle, avec l’aide de quelque sortilège d’amour que la belle bohémienne a dans son sac.

 

Nous voici ainsi transportés dans cette fable hispanique inspirée de l’œuvre de Prosper Mérimée, plongé au cœur du Séville des années 1820, charmés par les beaux costumes, la scénographie fluide et les chorégraphies soignées et énergiques d’Isabelle Bangoura (dont nous publierons l’entretien prochainement). La richesse des personnages, la complexité des scènes et des changements de costumes produisent un effet saisissant d’une grande scène d’opéra où les personnages sont foison. On a aimé la vive intervention des jeunes chœurs de la Maîtrise des Hauts de Seine qui ont apporté une fougue supplémentaire à des scénettes vives et grandioses.

 

On se laisse charmer par le jeu fort des personnages, par les choix scénographiques faits, voici un opéra fluide, qui se laisse apprécier sans ennui, c’est même rare, nous nous sommes retrouvés plongés dans autant de profusion de couleurs et de douces mélodies, au cœur de l’action et de la passion. Ce Carmen, un vrai opéra à vivre, une source de fraîcheur et d’émotion pour l’été. L’effet visuel est réussi, les beaux costumes chatoyants formant un contraste avec la lumière solaire qui inonde le plateau, cédant ensuite place à de beaux éclairages nocturnes finement étudiés.

 

Les scènes et les actes s’enchaînent, nous sommes pris par l’action et par le jeu scénique. Le premier acte est un prélude entraînant qui fait ensuite place à une mélodie plus pesante, puisqu’elle aborde le thème de la destinée. Cet acte représente notamment la rencontre entre Carmen et Don José. Le deuxième acte traite d’affaires de séduction entre Carmen et des contrebandiers dans une taverne. La chanson bohème de Carmen est peut-être la plus connue de cette deuxième partie. Suit le troisième acte, qui se passe à la montagne, où les contrebandiers se réunissent. Un duel entre Don José et Escamillo a lieu, puis Don José est incité à retourner au village; une décision que Carmen encourage. Nous voilà de retour à Séville pour le dernier acte : un nouveau duel entre Escamillo et Don José va avoir lieu, les deux hommes se battant pour l’amour de Carmen, qui dit se vouée à Escamillo. Au comble du désespoir, Don José assassine Carmen sous les yeux d’Escamillo.

 

La nuit est tombée et les acteurs, danseurs et chanteurs, tout feux de toute leur énergie pour animer cette large scène. L’orchestre, remarquable, nous réjouit d’une exécution parfaite, associé à une jolie acoustique. Placés sous la scène, nous apercevons le chef d’orchestre Vincent Renaud, qui le dirige avec vigueur et brio. Vincent Renaud assure également la direction musicale de cette belle production de saison. Le roumain Radu Mihaileanu a fait œuvre de génie dans la mise en scène dynamique et divertissante de cet opéra qui oscille entre le comique et le tragique. C’est l’un des opéras les plus réussis que nous ayons vu, dans un registre traditionnel.

On retrouvera avec joie les deux airs les plus célèbres de cet opéra : L’Amour est un oiseau rebelle et Toréador, deux extraits connus du grand public, désormais inclus dans le patrimoine national français du classique. Parmi les artistes doués présents sur scène, nous distinguerons la chanteuse russe Olga Tenyakova ainsi que le chanteur français Franck Lopez jouant le Dancaïre. Deux artistes impressionnants par leur puissance vocale et leur jeu distinctif, très mature et si brillant à la fois.

 

L’Opéra en Plein Air, une belle manifestation d’excellence des arts lyriques français, un rendez-vous incontournable des amoureux des émotions d’exception dans des cadres somptueux. Avec les réjouissances estivales de Versailles, l’une des plus belles expressions créatives de l’été. - www.operaenpleinair.com -

 

Juin 2018

Merce Cunningham
Théâtre national Chaillot

La résurrection du chorégraphe - Nous avons eu grand plaisir à venir découvrir pour la première fois les œuvres riches et mythiques du célèbre chorégraphe américain Merce Cunningham. Chorégraphe novateur et comptant parmi les plus influents du XXème siècle, il a créé plus de 200 œuvres en moins de soixante ans de carrière. Tout commence avec ses années étudiantes, à la fois intenses et accomplies puisqu’il étudie la danse à la prestigieuse Cornish School de Seattle, où il rencontrera son principal collaborateur, John Cage. Avant de devenir l’un des plus grands chorégraphes et danseurs de notre temps, il débute dans des compagnies contemporaines et ne cesse d’évoluer jusqu’à aujourd’hui. Représenté actuellement par des compagnies renommées telles que le Ballet de l’Opéra de Paris ou encore la Rambert Dance Company de Londres, il est populaire dans le monde entier.

 

C’est sous forme de tryptique que le travail de Merce Cunningham nous est présenté lors de cette représentation. Se distinguent ainsi John Cage, le poète et compositeur spécialisé dans la musique contemporaine expérimentale, accompagné du grand et virtuose Robert Swinston, assistant chorégraphe et directeur du CNDC qu’il crée en 1978. Aujourd’hui et depuis la disparition de Merce Cunningham, il continue de transmettre le répertoire emblématique de celui-ci, en recevant notamment le titre de Directeur de la Chorégraphie du Merce Cunningham Trust, même s’il présente aussi ses propres pièces de danse.

 

Nous nous asseyons sur les sièges de la salle Jean Vilar et attendons avec impatience le début joyeux de cette fantaisie dansée. Dans une grande rétrospective historique, le Théâtre National de Danse de Chaillot nous réjouit des meilleurs morceaux choisis de l’un des grands noms de la danse contemporaine, un artiste engagé qui célèbre avant tout l’expression de l’homme et de la nature. Tous se battent afin d’avoir une place près du nom du célèbre chorégraphe, mais c’est le brillant Centre National de Danse Contemporaine d’Angers qui a remporté cet honneur, et leurs danseurs nous interprètent les superbes chorégraphies de l’auteur, à savoir trois constructions d’espaces et de rythmes liées par un même fil conducteur: dépasser l’Homme et entrer en symbiose avec la nature, la sublimer.

 

L’entrée en scène se fait sur Inlets 2, une mise en scène épurée sur un fond or chatoyant, qui laisse libre cours à notre imagination et à l’improvisation des danseurs. Créée en 1983 par le fameux chorégraphe, la pièce est une variation d’Inlets, initialement jouée en 1977. Pas cadencés, silences et évocations sonores font le jeu réussi de cette grande fresque poétique évoquant le climat ainsi que la topographie de la Pacific North-East Coast. En effet, l’endroit n’est pas anodin puisqu’il s’agit du lieu de jeunesse de l’auteur. Tant de travail personnel produit une réussite, solaire et marque une rupture, un renouvellement dans le style du maître. Nous sommes restés émerveillés devant autant de grâce et de jeux subtils des danseurs qui personnifient les éléments de la nature, des êtres légers qui se baladent au firmament des astres. L’art de l’exécution des mouvements nous éblouit tout autant qu’il nous impressionne, leurs mouvements sont d’une coordination épatante, nous concevons tout le travail qui a dû être accompli à l’entraînement. Le spectacle est inauguré en mettant à l’honneur directement les souvenirs de l’auteur du ballet.

 

Vient ensuite Beach Birds, créée en 1991. Pièce complémentaire du premier épisode du spectacle, elle porte sur des études de la nature dans laquelle la présence humaine se fond. La pièce devient plus structurée et nous inspire une évocation ludique et imagée de superbes oiseaux des mers. Ils vont et viennent, tels une construction-déconstruction de leurs espace-temps, ils se posent, volent et virevoltent sous le rythme des percussions, utilisant des coquillages pour reproduire les sons marins. De prime abord la pièce nous a décontenancé, mais très vite, nous entrons dans cet univers et nos sens partent en voyage vers les douces côtes de Californie.

 

A travers cette superbe pièce, nous sentons le talent intemporel de Merce Cunningham, transmit par les pas gracieux de chacun des onze danseurs. Les mouvements du bas des jambes, les longs bras noirs étendus ainsi que chaque pas dansé des artistes avec précision soulignent notre regard attentif durant toute la comédie dansée.  Cette pièce reçoit les ovations d’un public conquis et passionné venu nombreux ce soir.

 

Pour clôturer ce festival d’émotions pures, le How To Pass, Kick, Fall and Run est présenté. Il s’agit de l’une des pièces fondatrices de l’œuvre de Merce Cunningham, construite à partir d’histoires de John Cage de 1965, compositeur des représentations. Deux narrateurs sont sur le côté de la scène et récitent des textes de Cage, une minute chacun. Original et authentique, la place des conteurs dans ce spectacle de danse rend celui-ci  unique et exceptionnel, c’est l’une des qualités que nous admirons chez le célèbre chorégraphe. Sur scène, les danseurs, en solos, en duos ou toute la troupe entière exécutent des pas de danse inspirés par l’instant dans une souplesse qui nous fascine, leurs sentiments expriment toujours avec grâce et puissance une force douce mais assurée. Certains passages nous évoquent volontiers West Side Story. Cette pièce, résolument rock, est typique des années 1960 et n’a pas pris une ride. On a apprécié autant de spontanéité et de force dans ces danseurs doués faisant foison de créativité personnelle et collective.

 

L’attraction spectaculaire et élégante se finit sous les applaudissements admirateurs de l’assemblée.

Pour notre plus grand plaisir, le brillant Robert Swinston vient saluer la salle avec ses danseurs du  CNDC d’Angers. Spectacle admirable et légendaire, nous avons adoré le talent et l’inspiration du chorégraphe Merce Cunningham et reviendrons volontiers voir l’une de ses compositions. Le spectacle fut un réel bonheur pour nous ainsi qu’une once de plaisir de pouvoir assister à cette commémoration de Merce Cunningham.

 

Nous remercions chaleureusement Catherine Papeguay, attaché de presse du Théâtre National de Chaillot, Clémentine Perrot notre rédactrice, ainsi que chaque danseur, chorégraphe et compositeur du spectacle de Merce Cunningham. Le théâtre de Chaillot est situé au 1 place de Trocadéro 75116 à Paris, www.theatre-chaillot.fr

Juin 2018

Domino Noir
Opéra-Comique

Moment musical et enflammé dans un lieu de prestige - Rendez-vous à l’Opéra-Comique pour une soirée haute en couleurs et en émotions. En cette fin du mois de mars, l’équipe de Gouts et Passions a assisté à Domino Noir, opéra d’une qualité incroyable que nous avons eu un grand plaisir à découvrir.

 

Les deux heures de représentation sont passées à une vitesse folle. Dès les premières notes, exécutées avec brio par l’orchestre, nous sommes sous le charme. Patrick Davin dirige les musiciens avec talent et bonne humeur, et cela se ressent. L’histoire est simple, mais son interprétation relève du génie. Horace est fol amoureux d’une jeune femme qu’il a rencontrée lors d’un bal l’année précédente, mais leur amour semble impossible pour des raisons qui lui restent obscures. Le premier acte relate alors leur deuxième rencontre, pleine de bonheur, musicalement intense, et pourtant trop vite écourtée. Il part alors à sa recherche et nous entrons dans un tourbillon d’aventures aussi drôles que farfelues.

 

La mise en scène est très moderne. Le Domino Noir est remis au goût de jour par Valérie Lesort et Christian Hecq, émérites metteurs en scène, accompagnés d’une troupe dotée d’un talent de folie et d’un niveau artistique inégalable. Les nombreux comédiens, chanteurs, danseurs, sont tous exceptionnels par leur jeu des plus sidérants. L’actrice principale, soprano, atteint des notes difficiles avec une facilité déconcertante et une clarté de voix remarquable. L’audience est conquise, nous rions, sourions et nous demandons si Horace pourra enfin retrouver sa belle inconnue. Les costumes, à la fois loufoques, beaux et inventifs, sont sans aucun doute le fruit d’un travail d’orfèvre, avec pour résultat des créations que nous ne verrons nulle part ailleurs. C’est aussi le cas pour les décors qui font partie intégrante du spectacle. Quelle n'était notre surprise et notre amusement, notamment à la vue des gigantesques gargouilles qui riaient et bougeaient en réponse aux performeurs.

 

L’Opéra-Comique est une institution musicale et théâtrale depuis sa création sous le règne de Louis

XIV. Théâtre National depuis 2005, la programmation proposée est d’une qualité hors pair. Les mises en scène ainsi que les événements mis en place par le lieu sont superbes, d’une modernité incroyable et de très bon goût.

 

Du XIXème siècle à nos jours, le Domino Noir n’a pas pris une ride pour notre plus grande joie. Dans le superbe écrin qu’est l’Opéra-Comique, nous sommes heureux d’avoir participé à cette délicieuse soirée. Nous remercions Alice Bloch-Rattazzi, attachée de presse de talent, pour son travail de qualité et sa réactivité, ainsi que notre rédactrice Bénédicte Alessi - 1 Place Boieldieu, 75002 Paris - Crédits photos : Vincent Pontetwww.opera-comique.com 

 

Avril 2018

L'Odyssée
Théâtre Impérial de Compiègne

Un opéra jeune et enchanteur - Trois solistes, un quatuor à cordes et un chœur d’enfants enthousiastes pour une nouvelle Odyssée. C’est toujours un immense plaisir que de répondre à l’invitation d’Éric Rouchaud, audacieux directeur du Théâtre Impérial de Compiègne, qui plus est pour découvrir une nouvelle œuvre de son jeune compositeur de génie : Jules Matton. D’une émouvante fraîcheur, sa version de l’Odyssée est des plus percutante. Pour soutenir cette œuvre sophistiquée et sensuelle, mais parfois brutale, qui de mieux que le Quatuor Debussy ?

 

Cette nouvelle partition nous offre d’explorer toute la palette de nos sensations et de jouer délicieusement de nos émotions. Ces quatre musiciens d’exceptions attaquent de front, sans apparente difficulté, des sommets techniques, ambitieux et riches pour nous embarquer ensuite dans de suaves nappes mélancoliques. Ils ne sont que quatre, et pourtant on l’oublie si vite. Cette nouvelle Odyssée Homérique nous invite à changer son habituel point de vue. Ce n’est plus d’Ulysse que part cette réflexion, mais de Télémaque, son fils. Enfermé dans ce no man’s land entre adolescence et jeune adulte, perdu, il n’a d’espoir que le retour de son père. Retour qui libérera sa mère, Pénélope, des assauts de faux prétendants et lui offrira, à lui Télémaque, fils du grand Ulysse, son identité, sa position. C’est Fabien Hyon qui déploie ce rôle semblant lui être taillé sur mesure. Avec une belle présence scénique, sa voix pleine et intense nous transporte avec facilité dans ses colères, ses interrogations, ses doutes et ses espoirs.

 

Pour soutenir Télémaque, un chœur d’enfants. Déjà si professionnels, leur fraîche myriade emplit la scène avec beaucoup de dynamique. Jules Matton n’a pas allégé pour autant sa partition et leur excellente cheffe de chœur Valérie Thuleau s’efface totalement tout en conduisant ces 25 jeunes artistes avec une grande précision. Dans leurs rôles de filles et fils des compagnons d’Ulysse, s’égaillant sur la plage, ils prennent soin de Télémaque. Ils lui inventent les exploits, les échecs de leurs pères, tentant ensemble de grandir malgré leur absence.

Ulysse est toujours présent. Avec une grande d’élégance et beaucoup de sobriété, le baryton Laurent Deleuil ne semble parfois n'être qu’une chimère sortie de l’esprit complexe de Télémaque. La mise en scène géniale de David Gauchard le fait évoluer en filigrane, nuançant sa présence jusqu’à son retour triomphant. Laurent Deleuil y excelle tant par son jeu précis et distingué que par son chant toujours irréprochable, autant dans les murmures que dans les tempêtes.

 

Notre plaisir était aussi dans l’impatience de retrouver l’excellente soprano Jeanne Crousaud. Résidente du Théâtre Impérial de Compiègne au même titre que Jules Matton, elle s’est montrée si performante et juste dans ses interprétations précédentes que le metteur en scène David Gauchard lui aura, pour cette Odyssée, réservé une double peine, qui sera pour nous une double récompense. Elle campe en effet Athéna, la sage et sublime déesse aux yeux pers qui veille sur Ulysse et accompagne les enfants, ainsi que la noble et magnifique Pénélope. Aucune déception, ses jeux se font encore plus brillants et sa voix paradoxalement aussi douce que puissante trouve exactement sa place dans cette si précise acoustique que Jeanne Croussaud maîtrise et avec laquelle elle joue avec délices, sans parler du ravissement provoqué par la joie évidente et partagée entre Jeanne et tous les enfants du chœur.

 

Tous évoluent sur un décor minimaliste mais absolument suffisant. Plus de trente artistes sont en permanence sur scène et pourtant la scénographie de Fabien Teigné accompagné des créations visuelles et numériques de David Moreau, effacent toute lourdeur dans une impression d’ensemble extrêmement dynamique. Nous n’avons en revanche pas été convaincus par le livret de Marion Aubert, lequel, dans un choix évident d’éclectisme, se voulait simple et accessible. Il nous a semblé manquant de ’’beaux verbes’’, limitant ainsi quelque peu le kaléidoscope des mélodies. Nous aurions sans doute apprécié pour cette œuvre d’une très grande richesse musicale un texte plus soutenu et imagé.

 

Nous remercions chaleureusement les dynamiques équipes du Théâtre Impérial, ainsi que Mathilde Lacour, leur chargée de communication pour son accueil et notre excellent placement, Isabelle Gillouard de l’agence Ysée pour ce moment de grande qualité au sein de ce lieu exceptionnel, ainsi que René Zimmerman, notre rédacteur - www.espacejeanlegendre.com

Avril 2018

Sydney Dance Company
Théâtre national Chaillot

Energie, fougue et équilibre – Le Sydney Dance Company, une compagnie de danse contemporaine originaire d’Australie, comme son nom l’indique, se produit du 11 au 13 avril 2018, dans ce magnifique écrin qu’est le Théâtre national de Chaillot. Sis au sein du Palais Chaillot, à côté de la Place du Trocadéro, nous sommes accueillis par une architecture grandiose, nous faisant presque paraître… Insignifiant, tandis que nous descendons les marches d’escaliers (et empruntons l’ascenseur) menant à nos places. La salle Jean Vilar s’emplit petit à petit, jusqu’à en devenir comble. Devant nous s’étend une immense scène, pour le moment close par des rideaux. Enfin, ces derniers se lèvent, pour dévoiler le spectacle proposé par le Sydney Dance Company, en trois « actes » : Wildebeest, Full Moon et Lux Tenebris.

 

Wildebeest, de Gabrielle Nankivell

Nous pouvons littéralement traduire ce titre néerlandais en Bête Sauvage. Et c‘est précisément ainsi que débute le premier acte : avec l’humain sauvage, l’homme qui est encore un loup pour ses contemporains. Ce dernier se contorsionne, se tord les membres, tandis qu’il peine à se tenir sur ses appuis, et quand il y parvient, il titube et retombe lourdement au sol. Enfin, il se redresse, marche, court et danse, rejoint par d’autres congénères.

Puis… Le tic-tac insistant d’une horloge, tandis que se met en place une chorégraphie se réglant petit à petit sur ce rythme. La civilisation. C’est l’instinct face à la connaissance.

 

Full Moon, de Cheng Tsung-lung

La Lune est un astre des plus singuliers. On déclame des sérénades à l’objet de son cœur, illuminé par la lumière argentée de cet astre, on l’associe à la fécondité et à la féminité. Chez les grecs anciens, elle était personnifiée par la déesse Séléné, décrite comme une femme sublime d’une blancheur étincelante, dame de nombres d’amants mythiques. Mais aussi, la Lune est associée aux sautes d’humeurs, et une légende urbaine conte qu’elle influence certaines maladies mentales.

Full Moon retranscrit parfaitement ces deux pendants de l’astre lunaire, tout d’abord en mettant en avant la Femme, avec un grand F, celle qui nous fait rêver, qu’elle se fasse proche ou distante, étrange ou mesurée, puis en jouant sur le thème de la folie, projetant les danseurs au sol, les tordant en tous sens jusqu’à ce que, épuisés, éreintés, ils retournent dans les ombres…

 

Lux Tenebris, de Rafael Bonachela

La lumière dans les ténèbres. Un titre approprié : les lumières ouvrent plusieurs tableaux sur scènes, qu’occupent les danseurs se contorsionnant en tous sens dans une danse tribale endiablée… Jusqu’à ce qu’un petit îlot d’accalmie vienne nous bouleverser, nous couper le souffle. Un couple, seuls sur scène, s’engage dans une danse calme et lascive. Leurs mouvements et postures créent une harmonie des plus troublantes. Et voir qu’il fut choisi de clore cet « acte » avec cette danse plonge le spectateur dans une sorte de bulle au sein de laquelle il peut se remettre des émotions de la soirée.

 

Nous noterons en particulier ce duo, composé de Charmene Yap et Todd Sutherland, qui nous invite au sein de leur intimité et qui, par leur simple interprétation, permet au spectateur de se délasser, de se reposer de l’énergie qui fut libérée tout le long de la représentation.

 

Nous tenons à remercier Catherine Papeguay, attachée de presse au Théâtre Chaillot, pour son invitation, ainsi qu’Antoine Barré, notre rédacteur. Sydney Dance Company se produit du 11 au 13 avril 2018 au Théâtre Chaillot. Crédits photos : Pedro Greig. www.theatre-chaillot.fr

 

Avril 2018